Le camp de Laurent Gbagbo a appelé samedi à la réconciliation, moins d'une semaine après la chute de l'ex-président ivoirien, tandis que son rival victorieux, le nouveau chef d'État Alassane Ouattara, a fait libérer près de 70 personnes retenues depuis lors à son quartier général.
«Nous devons arrêter l'escalade de la violence et de la déchéance», a déclaré Pascal Affi N'Guessan, président du Front populaire ivoirien (FPI), accompagné notamment d'Alcide Djédjé, ex-ministre des Affaires étrangères de M. Gbagbo.
Au pouvoir depuis 2000, M. Gbagbo a été arrêté lundi par les Forces républicaines (FRCI) de M. Ouattara, appuyées par la France et l'ONU, à l'issue d'une guerre de dix jours dans Abidjan et de près de cinq mois de crise post-électorale qui ont fait près de 900 morts selon les Nations unies.
«Au nom de la paix, arrêtons la guerre», a poursuivi M. Affi, appelant aussi à libérer les personnes arrêtées, dont M. Gbagbo, afin qu'il prenne «part à la réconciliation nationale».
Il prononçait cette déclaration solennelle dans un hôtel d'Abidjan, où il a trouvé refuge avec d'autres personnalités de son camp, protégés par les FRCI et l'ONU.
Près de 70 personnes, membres de la famille et employés de maison, qui avaient été arrêtées lundi à sa résidence avec l'ex-président, ont été libérées samedi, a annoncé le gouvernement sur la télévision TCI.
M. Gbagbo a été placé mercredi en résidence surveillée dans le nord du pays. Selon M. Djédjé, il se trouve à Korhogo, la grande ville de la région et fief de son rival. Son épouse Simone demeure au Golf hôtel.
Charles Blé Goudé, personnage clé du régime défait, faisait toujours l'objet d'intenses spéculations, son camp affirmant qu'il était «en lieu sûr», après avoir été un temps dit arrêté par les FRCI.
Il n'a pas été arrêté et se trouverait en «lieu sûr», a déclaré à l'AFP à Paris un conseiller de Laurent Gbagbo, Toussaint Alain.
De nombreuses rumeurs ont circulé quant au sort de Charles Blé Goudé, le chef des «jeunes patriotes» et ministre de la Jeunesse du président déchu. Des proches de Laurent Gbagbo le donnaient même tard vendredi «entre la vie et la mort», tandis que l'ONU affirmait ne disposer d'aucune information.
Le porte-parole du gouvernement, Patrick Achi, avait annoncé vendredi que M. Blé Goudé avait été «appréhendé» la veille et qu'il se trouvait en «résidence surveillée», avant de se rétracter.
La Gambie, petit pays d'Afrique de l'Ouest, a déclaré ne pas reconnaître M. Ouattara et affirmé que M. Gbagbo demeurait «le président légitime».
À Paris, plusieurs milliers d'Ivoiriens, et à Londres, environ 200, ont manifesté pour célébrer la victoire d'Alassane Ouattara et remercier la France et l'ONU.
À Abidjan, le nouveau pouvoir reprend en main progressivement une situation chaotique, misant sur une réouverture imminente de l'administration.
Les fonctionnaires qui avaient cessé de travailler en raison des violences à Abidjan sont appelés à reprendre «impérativement» le travail lundi. La TCI a ajouté que la rentrée des classes était prévue le 26 avril.
Le couvre-feu a été allégé à partir de ce samedi et s'appliquera jusqu'à lundi de 22 h à 6 h (locales et GMT), au lieu de 18 h à 6 h, selon le ministère de la Défense.
Autre signe d'un progressif retour à la normale: le camp militaire français de Port-Bouët, dans le sud d'Abidjan, a cessé vendredi soir d'être une base d'accueil pour les personnes évacuées lors des combats.
Au total quelque 5000 personnes, pour moitié des Français, avaient rejoint le camp, dont quelque 3.300 ont quitté le territoire ivoirien, selon la force française Licorne.
Dans les rues d'Abidjan, la sécurité s'améliorait petit à petit malgré le désordre et les pillages persistants dans certains secteurs. – AFP