Le président burkinabè Blaise Compaoré, face à une contestation grandissante dont une mutinerie de soldats à Ouagadougou qui a gagné Pô, une ville symbolique du Sud, tente de contenir la révolte en nommant de nouveaux chefs militaires qui lui sont proches.
Des tirs en l'air de militaires, qui ont commencé samedi soir, étaient toujours entendus dimanche à Pô où des soldats se livraient encore à des pillages, selon des habitants joints par l'AFP depuis Ouagadougou.
"Les tirs continuent et se sont intensifiés. Les militaires sont actuellement dans la ville, certains sont à pied, d'autres à moto", a raconté un habitant.
"Les pillages (commencés samedi) continuent. Ceux qui s'aventurent en ville avec leurs véhicules, se les voient retirer par les soldats", dit un autre.
Les raisons de cette mutinerie de soldats à Pô n'étaient pas connues dimanche et aucune source militaire n'était joignable dans cette ville située à 143 km de Ouagadougou.
Les derniers incidents y ont fait deux blessés par balle, selon une source hospitalière contactée par l'AFP.
Cela porte à au moins 45 le nombre de personnes blessées à Ouagadougou et à Pô depuis jeudi, selon un décompte fait par l'AFP.
Pô, une ville située à la frontière ghanéenne, est un symbole pour le président Compaoré qui a dirigé son centre national d'entraînement et de commandement (CNEC).
C'est de Pô que le capitaine Blaise Compaoré est parti avec ses commandos pour renverser le commandant Jean-Baptiste Ouédraogo et installer au pouvoir son ami et compagnon d'armes, Thomas Sankara, en 1983.
Ce dernier sera tué en 1987 lors de la prise du pouvoir par M. Compaoré à la suite d'un coup d'Etat.
Tous les éléments de l'actuelle garde présidentielle burkinabè ont été formés à Pô.
Le président Compaoré fait face depuis février à une série de contestations de militaires, de la jeunesse, de magistrats et de commerçants.
Pour contenir la révolte des militaires qui a repris jeudi à Ouagadougou, le chef de l'Etat burkinabè a nommé samedi soir de nouveaux responsables à la tête des armées de terre, de l'air et de la gendarmerie.
Il a promu des fidèles dont certains étaient ses compagnons au moment de sa prise du pouvoir en 1987. C'est le cas du nouveau chef d'état-major, le colonel-major Honoré Nabéré Traoré, et du nouveau chef de corps de la garde présidentielle, le colonel-major Bouraima Kéré.
Vendredi soir, le chef de l'Etat burkinabè a nommé le colonel-major Nabéré à la tête de l'armée et dissout le gouvernement du Premier ministre Tertius Zingo. Un couvre-feu de 19H00 à 06H00 (locales et GMT) a été instauré samedi par le ministère de la Sécurité.
Malgré ces mesures, la contestation n'a pas faibli, gagnant la garnison de Pô.
A Ouagadougou, la première nuit de couvre-feu a été calme, selon un journaliste de l'AFP. Le trafic avait légèrement repris dimanche mais les commerces et le principal marché de la ville, habituellement ouverts, restaient fermés.
Samedi, excédés par les pillages des soldats mutins, des commerçants de la capitale s'en sont pris à plusieurs édifices publics.
Le ministère français des Affaires étrangères déconseille désormais fortement aux Français tout voyage au Burkina Faso, a indiqué dimanche son site internet. Jusqu'à samedi, le ministère s'était limité à recommander "de différer les voyages non-essentiels" dans ce pays.
Le gouvernement Burkinabè va sanctionner tout usage illégal d'arme à feu
Le gouvernement burkinabè a annoncé dimanche dans un communiqué des sanctions contre les utilisateurs illégaux d'armes à feu alors qu'une mutinerie de soldats, partie jeudi de Ouagadougou, a gagné la ville de Pô (Sud) et a fait au moins 45 blessés par balle depuis lors.
"Depuis quelques jours, des individus militaires comme civils, à la faveur des dernières manifestations, utilisent des armes à feu au mépris des dispositions réglementaires en la matière portant ainsi atteinte à la sécurité des personnes et des biens", indique un communiqué du ministère de la Sécurité.
"Cet état de fait ne saurait être toléré dans un Etat de droit", ajoute le texte.
Le ministère "en appelle au sens élevé de responsabilité de tout un chacun et au strict respect des textes réglementant l'utilisation des armes et munitions militaires et civiles" et annonce que "tout contrevenant se verra appliqué toute la rigueur de la loi".
Le Burkina est secoué depuis jeudi par une mutinerie de soldats, partie jeudi de Ouagadougou, avant d'atteindre samedi soir la ville de Pô, à 143 km de la capitale.
Des soldats procèdent depuis lors à des tirs en l'air pour manifester leur colère sur fond de pillages.
Au moins, 45 personnes ont été blessées par balle depuis jeudi à Ouagadougou et à Pô, selon un décompte fait par l'AFP à partir de chiffres donnés par des sources hospitalières.
Le calme est revenu depuis samedi dans la capitale mais les tirs en l'air se poursuivaient dimanche à Pô, selon des témoins.
Selon des observateurs, des personnes ont infiltré les mutins, à Ouagadougou notamment, et utilisent des armes à feu, pour profiter des pillages.
Poursuite des tirs à Pô, négociations en vue avec les mutins
Les tirs en l'air de militaires se poursuivaient dimanche dans la ville burkinabè de Pô (sud) où les autorités ont envoyé une délégation pour discuter avec les soldats en mutinerie depuis samedi soir, a-t-on appris auprès de témoins et de source sécuritaire.
Par ailleurs deux partis d'opposition du Burkina Faso ont indiqué dimanche à l'AFP que leurs sièges avaient été attaqués dans la nuit de samedi par des inconnus dans la capitale, Ouagadougou.
"Les tirs continuent. Pô ressemble à une ville morte. Chacun est chez soi", a rapporté un habitant à l'AFP.
Selon un responsable d'une radio communautaire joint depuis Ouagadougou, les mutins ont dans un communiqué publié dimanche "demandé aux habitants de rester chez eux".
"La hiérarchie a envoyé une mission pour discuter avec les éléments à Pô", a déclaré a l'AFP un officier de l'état-major général des armées qui s'est exprimé sous couvert de l'anonymat.
Il n'a dit pas la composition de la mission ni les raisons de la mutinerie des soldats. Située à 143 km de Ouagadougou, non loin de la frontière avec le Ghana, la ville abrite les centres de formation des commandos et des officiers burkinabè.
Des soldats de cette garnison procèdent depuis samedi soir à des tirs en l'air et des pillages, avaient indiqué plusieurs témoins à l'AFP.
Selon un habitant, ils ont saccagé samedi soir des maisons de deux chefs militaires.
La contestation militaire à Pô survient après celles de la capitale où des soldats de trois garnisons se sont mutinés jeudi et vendredi, en tirant en l'air et en se livrant à des pillages, déclenchant des manifestations de vive protestation de commerçants.
Le calme était revenu dans la nuit de samedi à Ouagadougou à la suite du couvre-feu de 19H00 à 06H00 (locales et GMT) instauré le même jour par le ministère de la Sécurité, selon des témoins.
Mais deux partis d'opposition ont déclaré dimanche que leurs sièges avaient été attaqués dans la nuit par des inconnus.
"Des individus non identifiés sont arrivés peu avant le couvre-feu et ont jeté une bouteille de gaz dans notre siège (près du centre-ville) qui a pris feu. Les voisins nous ont aidé a éteindre l'incendie", a indiqué Malick Sawadogo, un député de l'Union pour la renaissance/Parti sankariste (UNIR/PS) de Me Bénéwendé Stanislas Sankara, le principal opposant burkinabè.
De son côté, le chef du Front des forces sociales (FFS), Norbert Michel Tiendré Béogo, a affirmé que le siège de son parti, situé dans la périphérie de la capitale, a été "saccagé hier (samedi) nuit par des individus non identifiés qui y ont mis le feu éteint ensuite".
Le pouvoir burkinabè a nommé samedi nommé de nouveaux chefs à la tête de l'armée pour stopper la révolte des militaires.
Le président Blaise Compaoré, au pouvoir depuis 1987, est confronté depuis février à des contestations venant notamment de jeunes, magistrats et soldats.