L'esprit du légendaire musicien et rebelle nigérian Fela Kuti revient cette semaine à Lagos avec une comédie musicale plaçant l'afrobeat sur le devant de la scène dans sa terre natale.
De Broadway à Londres, la comédie, titrée simplement Fela, a suscité d'enthousiastes critiques. Elle arrive maintenant dans la sauvage Lagos, pour évoquer la vie passionnée d'un homme qui s'était marié à 27 femmes le même jour et avait formé une communauté qu'il avait déclaré indépendante du Nigeria, la République du Kalakuta. Avant de mourir des suites du sida à 59 ans, en 1997.
Fela est une tornade humaine, déclare l'acteur Sahr Ngaujah, qui joue le rôle de l'un des musiciens les plus connus au monde, qui a créé l'afrobeat, un style de musique funky, cuivres et choeurs yoruba, toujours à la mode.
Il était unique... J'ai aimé Fela et sa musique depuis que je suis un enfant, s'enthousiasme l'acteur sierra-léonais, qui entamait mercredi le premier de six concerts prévus dans un hôtel de luxe de Lagos.
En hommage à Fela et ses fans, les organisateurs avaient programmé dimanche une première session de la comédie au New Afrika Shrine, le club appartenant à la famille de Fela et qui remplace son ancien club, le Shrine.
Les tickets ont alors été vendus au prix de sept dollars, mais il faudra payer entre 33 et 233 dollars pour les prochains dans l'hôtel de luxe.
Un tarif élevé qui a été critiqué dans ce pays si pauvre, aux richesses pétrolières pourtant immenses. Des pauvres dont Fela Kuti prenait, haut et fort, la défense.
Au cours de la session de dimanche, la prestation musicale avec son saxophone, et vocale, de Ngaujah, qui sait bien reproduire la gestuelle sur scène de Fela, a provoqué l'enthousiasme des invités triés sur le volet, des milieux de la mode aux universitaires.
J'aime Lagos, j'aime le Nigeria et j'aime le Shrine, a-t-il chanté dans un anglais pidgin, escorté d'unhe dizaine de danseuses de Fela.
Ce que j'aime chez Fela c'est sa passion du travail, son courage, a déclaré le chanteur à l'AFP, qui se produisait en tee-shirt noir sur lequel était écrit Naija man, l'homme nigérian, en pidgin.
Une banderole au dessus de la scène arborait les portraits d'autres icônes africaines: le Ghanéen Kwame Nkrumah, le Congolais Patrice Lumumba, le Guinéen Sékou Touré et le Burkibanè Thomas Sankara.
Il y avait aussi, le portrait de la mère de Fela, Funmilayo Ransome-Kuti, qui fut une féministe en vue et une active militante politique.
Le producteur exécutif, Rikki Stein a reconnu que présenter ce spectacle à Lagos, ville de 15 millions d'habitants, sans transports publics et avec beaucoup de complications logistiques, avait été un défi.
C'était un défi, mais je suis heureux de le faire, a dit à l'AFP le Britannique, qui fut longtemps le partenaire de Fela.
J'étais le manager de Fela à travers le monde pendant 15 ans jusqu'à ce qu'il meure en 1997. Je suis aussi la gardien du temple de Fela.
La comédie diffuse aussi ses messages, toujours d'actualité, en faveur de vrais changements dans le monde, dit Stein.
Ce concert montre que le message de sa musique est toujours valable aujourd'hui, parce que rien n'a vraiment changé au Nigeria.
Je partage les vues de Fela sur la transparence, l'honnêteté, la lutte contre la corruption et contre la mauvaise gouvernance, a expliqué le producteur.
Pour la Noire Américaine Jill Vallery, qui mène les danseurs, la tournée nigériane est aussi une émouvante occasion de visiter le continent de ses ancêtres.
En tant qu'Afro-Américaine, je me sens comblée de faire partie de la tournée. Je reviens chez Fela, a dit Vallery, qui a tourné avec la troupe en Europe et aux Etats-Unis.
Après Lagos, la comédie musicale Fela fera un tour de planète: Pays-Bas, Grande-Bretagne, Etats-Unis, Afrique du Sud et Australie. - AFP