Mohammed Belkacemi, cadre de la Fédération française de football (FFF), a permis indirectement au site d’information Mediapart de révéler l’affaire des quotas de binationaux. Présent lors d’une réunion le 8 novembre, il a enregistré les débats évoquant des restrictions d’accès aux centres fédéraux envers les joueurs issus de l’immigration africaine et nord-africaine. Belkacemi affirme avoir ensuite confié l’enregistrement aux dirigeants de la FFF le 9 novembre, version démentie par son président Fernand Duchaussoy.
On connaît l'identité de la source liée au scandale des quotas de joueurs français d'origine africaine qui agite la Fédération française de football (FFF) depuis les révélations du site Mediapart : il s’agit de Mohammed Belkacemi, fonctionnaire du ministère des Sports détaché depuis trois ans à la FFF, où il est chargé à la Direction technique nationale (DTN) de la promotion du football dans les cités de banlieues.
Mohammed Belkacemi, présent lors de la réunion du 8 novembre 2010 où des quotas dans les centres de formations fédéraux ont été évoqués, a admis avoir enregistré les débats. « J'ai tout expliqué à la commission d'enquête (ce 3 mai), a-t-il affirmé sur la chaîne Infosport. J'ai enregistré la réunion du 8 novembre 2010 pour témoigner en interne des propos inqualifiables que j'avais déjà entendus auparavant. J'ai remis le seul enregistrement à la Fédération le 9 novembre 2010 pour confirmer mes propos ».
«Aller au bout de l’enquête»
Interrogé par la commission diligentée par la FFF, Mohammed Belkacemi s’est en revanche défendu d’avoir transmis directement les informations au site Mediapart : « Je n'ai jamais remis l'enregistrement à un journaliste. Cette tempête médiatique ne me profite pas. Je n'ai aucun intérêt à une telle publicité. Je n'ai aucun intérêt à un débat public. » D’après Mediapart et Le Parisien, l’enregistrement est resté entre les mains d’André Prévosto, en charge du pôle du football amateur et à l'époque directeur général adjoint de la FFF.
La ministre des Sports, Chantal Jouanno, qui a lancé sa propre enquête, s’est étonnée que l’affaire éclate avant les élections à la présidence de la FFF le 18 juin : « Il faut aller au bout de l'enquête, savoir pourquoi cet enregistrement a été fait, pourquoi il ne sort que six mois après, en pleine période préélectorale à la Fédération. »
« Jusqu'à jeudi dernier dans la soirée, je n'ai à aucun moment été informé par quiconque des échanges tenus au cours de la réunion du 8 novembre 2010, pas plus que de l'existence d'un enregistrement », s’est défendu Fernand Duchaussoy, le président de la FFF. Après avoir trouvé la « taupe » à l’origine des fuites, les commissions vont se pencher sur cette question : à qui profite cette affaire ? Sûrement pas au football français.
Scandale des quotas à la FFF : Rappel des faits
8 novembre 2010 : Lors d’une réunion à la FFF sur la formation, le Directeur technique national François Blaquart évoque une politique officieuse de quotas à l’entrée des centres fédéraux. Le but: limiter l’accès à des jeunes binationaux qui pourraient choisir le pays d’origine de leurs parents au détriment des sélections françaises. Sont visés implicitement les joueurs d’origine africaine. Laurent Blanc, le sélectionneur de l’équipe de France, approuve le principe d’une limitation et pointe du doigt la proportion de joueurs puissants, surtout des «blacks» dans les écoles de football.
28 avril 2011 : Mediapart révèle les propos tenus lors de la réunion du 8 novembre sous le titre «Foot français: les dirigeants veulent moins de noirs et d'arabes»
29 avril 2011 : Fernand Duchaussoy, le président de la FFF, et François Blaquart à Paris, et Laurent Blanc à Bordeaux, réaffirment que les allégations de Mediapart sont fausses.
30 avril 2011 : Mediapart publie le verbatim des propos tenus lors de la réunion du 8 novembre. François Blaquart est suspendu de ses fonctions et Laurent Blanc s’excuse si une mauvaise compréhension de ses propos a pu heurter certaines sensibilités.
3 mai 2011 : Les commissions d’enquêtes entament leurs entretiens avec les personnes présentes lors de la réunion. Avant même le début des consultations, Mohammed Belkacemi, cadre de la FFF en charge du football dans les quartiers, avoue avoir enregistré le contenu des débats et l'avoir remis aux dirigeants de la Fédération. Fernand Duchaussoy dément avoir eu connaissance de cet enregistrement. - RFI