Devant la répression exercée en Syrie contre les contestataires du régime de Bachar el-Assad, les Etats-Unis et leurs alliés ont pour la première fois explicitement demandé jeudi au président Bachar el-Assad de quitter le pouvoir.
Selon un rapport de l'ONU qui conclut à la mort d'au moins 1.900 personnes dans les violences à la mi-juillet -soit quatre mois après le début du soulèvement-, les forces syriennes pourraient s'être rendues coupables de crimes contre l'humanité.
Une réunion à huis clos du Conseil de sécurité devait avoir lieu dans la journée à New York, au cours de laquelle la Haute-Commissaire aux droits de l'homme Navi Pillay devrait recommander que la justice internationale soit saisie.
Fait sans précédent depuis le début du soulèvement en Syrie, Barack Obama a estimé dans une déclaration écrite que le temps était venu pour Bachar el-Assad de démissionner.
Les promesses de réformes du dirigeant syrien "sonnent creux", il "emprisonne, torture et tue son propre peuple", a dénoncé le chef de la Maison Blanche. Les Syriens décideront de l'avenir de leur pays mais Bachar el-Assad se tient en travers de leur chemin et il doit partir, a ajouté Barack Obama.
La cheffe de la diplomatie américaine lui a emboîté le pas peu après pour détailler les nouvelles sanctions contre Damas (gel de tous les avoirs du gouvernement syrien aux Etats-Unis et mesures visant le secteur énergétique du pays).
Ce durcissement a fait l'objet d'interventions coordonnées dans les capitales occidentales.
Quasiment au même moment, la Haute représentante de l'Union européenne pour les Affaires étrangères Catherine Ashton appelait le raïs de Damas à quitter le pouvoir, soulignant sa "perte complète de légitimité aux yeux du peuple syrien".
Les dirigeants français, allemand et britannique se sont élevés ensemble contre un dirigeant qui, à leurs yeux, "ne peut plus prétendre diriger le pays". Le président Assad "a recours à la force militaire brutale contre son propre peuple" et "porte la responsabilité de la situation", ont souligné le président français Nicolas Sarkozy, la chancelière allemande Angela Merkel et le Premier ministre britannique David Cameron dans une déclaration commune.
"Nous l'appelons à tirer les conséquences du rejet total de son régime par le peuple syrien et à quitter le pouvoir, dans l'intérêt supérieur de la Syrie et de l'unité de son peuple", ont-ils ajouté.
Une position également exprimée par le gouvernement canadien.
Il s'agit d'un nouveau pas franchi par Washington, Ottawa et l'UE qui ont imposé des sanctions ciblant directement membres et partisans du régime syrien actuel, en raison de la répression.
Ces déclarations groupées intervenaient au lendemain d'un entretien téléphonique entre le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon et Bachar el-Assad, lequel a affirmé que les opérations militaires et policières avaient cessé.
Reste que des militants des droits de l'Homme ont déclaré jeudi que des tirs se poursuivaient à Lattaquié, ville du nord-ouest soumise ces derniers jours à un assaut de l'armée, et que les forces syriennes avaient abattu au moins 18 personnes mercredi.
D'après l'Observatoire syrien pour les droits de l'Homme, basé à Londres, et les Comités locaux de coordination, qui participent à l'organisation des manifestations en Syrie, les forces de sécurité ont ouvert le feu à Homs, dans le centre du pays, faisant neuf morts. Selon Muhannad al-Hassani, responsable d'un autre mouvement de défense des droits de l'homme, il y a eu également neuf morts mercredi ailleurs en Syrie.
Selon une mission d'enquête des Nations unies, dirigée par le Haut commissaire adjoint aux droits de l'Homme Kyung-wha Kang, les forces syriennes pourraient avoir commis des "crimes contre l'humanité" en ayant recours à des exécutions sommaires, en torturant des prisonniers et en visant des enfants lors des opérations contre les partisans de l'opposition.
La mission d'enquête dit avoir établi une liste confidentielle de 50 auteurs présumés d'exactions à des "niveaux divers" du gouvernement syrien.
Dans un rapport de 22 pages, elle recommande au Conseil de sécurité de l'ONU de renvoyer le dossier syrien devant la Cour pénale internationale (CPI) en vue de procédures judiciaires pour des atrocités, une initiative qui devait être soumise à débat jeudi lors d'une réunion à huis clos à New York. Selon les conclusions des enquêteurs, qui ont interrogé de nombreux témoins entre 15 mars et le 15 juillet, au moins 1.900 personnes avaient été tuées à la mi-juillet, un bilan que le gouvernement syrien a confirmé en précisant qu'il incluait au moins 260 membres des forces de sécurité.
A Genève, le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU a précisé que la situation en Syrie ferait l'objet d'une réunion lundi. Un projet de résolution que fait circuler la Pologne appelle à une deuxième enquête sur les événements qui se sont produits depuis le 15 juillet. - AP