Le 4 janvier, Palais du peuple, salle des Actes, 10h 15. Le président du Comité de facilitation pour le dialogue politique dit inclusif, Mgr Albert Gomez, a réuni les leaders politiques pour la poursuite du dialogue entamé le 27 décembre 2011.
Le Collectif des partis politiques pour la finalisation de la transition et l’Alliance pour la démocratie et le progrès qui regroupent les principaux partis politiques de l’opposition n’ont pas pris part à la rencontre. Rappelons que le 2 janvier 2012, ils avaient claqué la porte après avoir fait lecture d’une déclaration qui veut d’un dialogue bipartite. C’est-à-dire un dialogue entre le pouvoir et les partis de la mouvance présidentielle d’un côté, et l’opposition dite radicale de l’autre. Mais ce dialogue a été suspendu ce matin pour la quatrième fois. Mgr Gomez avant de donner les raisons, a déclaré qu’hier (3 janvier Ndlr) le Comité a eu « tout le temps nécessaire pour rencontrer les nombreux interlocuteurs». De ces multiples rencontres avec notamment le Collectif et l’ADP, Mgr Gomez dit avoir tiré une conclusion: «Il était nécessaire que nous vous (Club des républicains, centristes et autres Ndlr) demandions l’autorisation de nous donner cette journée pour que nous rencontrions le Chef de l’Etat… » Du fait, explique-t-il, que le Collectif et l’ADP ont remis en cause les TDR (Termes de références) du Comité qu’il préside. Il a réitéré sa volonté de poursuivre «ce dialogue inclusif», avant d’indiquer dans des propos dithyrambiques : «Lorsque nous nous rendons compte que la vision développée par ceux qui ont quitté ne rentre pas dans ce cadre, avant de continuer, nous avons estimé que nous devons rencontrer l’autorité, qui est de toute façon celle qui gère la Guinée, donc rencontrer le Président de la République qui est élu souverainement…»
Pour le religieux, la déclaration du Collectif change «le fondement» de leur présence. C’est pourquoi, dit-il, il y a lieu de rencontrer le Président Alpha Condé pour «échanger avec lui» avant de venir leur donner les détails de cette rencontre qu’il aura eu avec le Président.
Mais qu’est-ce qu’il a échangé le mardi 3 janvier avec le Collectif et l’ADP ? Mgr Gomez ne veut pas en parler. En tout cas à la presse, pour le moment. Mais selon une source digne de foi, les deux forces politiques auraient dit au Comité «les quatre vérités».
Celles de dire au pouvoir, notamment à Alpha Condé, qu’il y a des «préalables et principes qu’il faut respecter pour changer le Code électoral, (pour parler de la reprise du recensement qu’ambitionne le gouvernement) mais aussi il faut dire au Président de la République la vérité pour éviter la répétition des évènements malheureux que la Guinée a connus ces cinq dernières années…»
Notre source rappelle que «les religieux avaient refusé de dire la vérité au Général Lansana Conté en décembre 2006 d’où les évènements de janvier-février 2007, les mêmes ont refusé de dire la vérité au Capitaine Dadis, conséquence : les massacres et les viols du 28 septembre 2009…»
Notre interlocuteur soutient que les deux blocs politiques ont demandé à Mgr Gomez de faire comprendre au Président Alpha Condé qu’il n’y a pas un problème entre le RPG-Arc-en-ciel avec ses partis alliés et le Collectif et l’ADP, mais qu’il y a problème entre les deux blocs politiques et le pouvoir. Et que, poursuit notre source, le «dialogue ne se fera pas sans la participation du Collectif et de l’ADP».
Le Président de l’UFDG (Union des forces démocratiques de Guinée), Cellou Dalein Diallo, rencontré peu après la suspension de la rencontre de ce matin, a révélé les dits et non-dits de la rencontre que le Comité de facilitation pour le dialogue politique inclusif a eu avec le Collectif auquel son parti est membre et l’ADP. Selon lui, il n’y a pas eu de TDR précis en ce qui concerne la mise en place dudit Comité. Le Président de l’UFDG a dit : «Ce que nous savons (le Collectif et l’ADP), nous avons reçu Mgr Gomez qui avait été désigné au cours d’une réunion à laquelle nous n’avions pris part, pour présider un Comité de facilitation. Nous savions que nous ne reconnaissions pas ce Comité mis en place sans nous, mais que nous faisons confiance à Mgr Gomez et à une équipe restreinte dont on aura désigné les membres pour conduire la facilitation de rapprocher les deux parties, afin que le dialogue puisse s’ouvrir. A l’issue de toutes les tractations que nous connaissons tous, le Comité a réussi à amener le gouvernement à satisfaire les deux conditionnalités que les deux blocs politiques avaient posées. Après quoi, on a décidé d’aller au dialogue.» Et de dire que lors de la première rencontre, il fallait définir ceux qui devraient participer au dialogue. Dans son entendement, il n’y a que le Collectif et l’ADP qui ont des conflits avec le Gouvernement par rapport aux préalables à satisfaire pour aller aux élections. Les deux blocs politiques, dit-il, ne sont pas d’accord avec la composition actuelle de la CENI, avec la reprise intégrale du recensement, ni avec l’engament de l’administration auprès du RPG dans le cadre de ces élections… M. Diallo a dit même s’il est favorable à un dialogue inclusif, pour le moment, il veut qu’il soit bipartite. Et d’insister que ce sont deux parties qui doivent prendre part au dialogue : le Collectif et l’ADP d’un côté, le pouvoir de l’autre avant de préciser que «tous les partis qui ne participent pas au gouvernement et qui ne soutiennent pas le gouvernement peuvent être considérés comme des partis de l’opposition. Ils peuvent rejoindre le Collectif et l’ADP, mais en face, nous devons avoir le pouvoir avec peut-être les partis qui le soutiennent».
M. Ibrahima Kassory Fofana, président de GPT (Guinée Pour Tous) a également réagi en ces termes: «Ce n’est pas une position raisonnable. On n’a pas encore abordé les problèmes de fond. Il n’y a pas eu une objection quelconque de qui que ce soit sur un point de réclamation donné.» Pour M. Fofana, la position du Collectif et l’ADP « pose problème. » Pour lui, «la politique de la chaise vide n’est pas une approche productive. Qu’il y ait des problèmes, je peux comprendre, s’il y a aussi un problème de l’agenda des négociations, je peux comprendre, mais qu’il y ait des blocages dès au début, je me pose des questions. Je ne fais pas un jugement de valeur, mais je dis à mes collègues de l’opposition républicaine d’être raisonnables. Nous devons tous penser la Guinée. Il n’y a pas de question qui ne puisse pas trouver des solutions. Le peuple de Guinée attend de l’opposition à ce que nous sortions de ces négociations consensuelles pour permettre au pays de poursuivre le processus électoral rapidement. Parce que tout le monde est bloqué, ce n’est pas que le gouvernement, mais la Guinée…»
C’est pourquoi, il a lancé un appel au Collectif et à l’ADP pour revenir sur la table de négociation. Il y va, conclut-il, de l’intérêt de l’opposition, des centristes et de la mouvance d’aller à «ces élections dans des conditions de transparence souhaitable pour que les résultats soient crédibles et incontestables ».
M. Mouctar Diallo, président des NFD réaffirme la volonté du Collectif et de l’ADP de participer à «un dialogue inclusif mais bipartite». Il a asséné : «Ce n’est pas au Président de dire qu’il est d’accord ou pas… Puisqu’il n’a pas encore montré sa volonté politique et sa capacité de conduire à terme le processus électoral comme son homologue ivoirien l’a fait…» Il accuse le Président Alpha Condé de jouer à «des manœuvres dilatoires pour se soustraire de la pression de la communauté internationale en faisant des partis de l’alliance qui l’a conduit au pouvoir, des centristes opposants…» Il souhaite que le Comité soit «capable de prendre sa responsabilité pour dire la vérité aux deux parties concernées pour aboutir à quelque chose devant permettre d’aller à des élections législatives transparentes, crédibles et acceptées de tous».
La rencontre entre le Comité et les leaders politiques pour la poursuite du dialogue inclusif suspendu ce matin, reprend ce jeudi 5 janvier, a rassuré Mgr Gomez.
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