Au lendemain du dialogue politique inclusif, le 23 février, les leaders politiques de l’Alliance pour la Démocratie et le Progrès et du Collectif des partis politiques pour la finalisation de la transition se sont réunis au domicile de M. Sidya Touré, président de l’Union des forces républicaines, (UFR) pour tirer les leçons du dialogue politique. Après leur huis-clos, AfricaLog.com leur a tendu le micro. Et ils n’ont pas hésité à juger le rapport final du dialogue. Insatisfaits du contenu dudit document, les leaders guinéens de l’opposition dite radicale envisagent de se faire entendre à travers des meetings et une caravane à l’intérieur du pays. De préférence, lisez!
Cellou Dalein Diallo, président de l’UFDG: «Le gouvernement n’a pas voulu faire des concessions…»
«Nous avons tiré les leçons de ce dialogue avec cette conclusion: le dialogue a été un échec. Car, sur les questions essentielles, il n’y a pas eu d’accord. La mouvance présidentielle a introduit des questions qui étaient d’avance réglées par la loi. Tout le monde était d’accord sur le respect de l’autorité de l’Etat, la liberté de mouvement des partis, la neutralité de l'administration. Mais les questions essentielles comme la CENI, le fichier électoral, les conseillers communaux, n’ont pas fait l’objet d’accord. Le gouvernement n’a pas voulu faire des concessions et a refusé systématiquement la recomposition de la CENI. Or, on le sait, si on doit aller aux élections avec la loi 013, qui a créé et fixé les conditions de composition de cette CENI, on devrait rétablir la parité entre le pouvoir et l'opposition. La garantie de la confiance, que l’opposition et le pouvoir doivent avoir, repose sur cette parité. Aujourd'hui, la CENI n'inspire plus confiance.
D'abord, la question de Louncény Camara a été réglée entre les deux tours de la présidentielle, mais le gouvernement ne veut pas qu'on y touche. Or, son incapacité et son inaptitude à diriger la CENI a été acceptée par tout le monde, y compris le RPG et les autorités de la transition. Rien n'a changé par rapport à cette crise de confiance par rapport à Louncény. Ensuite, il y a la recomposition du paysage politique. Pendant la transition, il n'y avait ni pouvoir ni opposition. Mais aujourd'hui, il y a un pouvoir, une opposition et une mouvance présidentielle. Donc, il faut que la parité soit rétablie pour qu’il y ait la confiance.
S’agissant des conseillers communaux, tout le monde est d’accord que c’est une violation flagrante du Code des collectivités qu'ils ont dissouts. Mais des gens disent qu'il faut abandonner cette exigence, sinon le pouvoir va perdre la face, alors que la loi a été violée. Or, les délégations spéciales nommées sont des gens qui agissent en faveur du pouvoir en organisant une mascarade électorale. Dans le dialogue, il n’y a eu aucun effort pour rapprocher les positions. Ils n’ont fait que noter les divergences, donc il a été un échec. Mais nous allons prendre nos dispositions pour marquer notre indignation et notre déception face au manque de résultat concluant de ce dialogue.»
Sidya Touré, président de l’Union des forces républicaines, (UFR): «Ce n’est qu’un document qui retrace les constats d'échec des discussions…»
«Nous avons examiné le rapport de synthèse du dialogue politique et ce qu’on peut dire de la manière la plus claire et la plus nette, c’est que ce n’est qu’un document qui retrace les constats d'échec des discussions, puisque nous n'avons pu obtenir d'accord général sur les deux à trois questions essentielles qui faisaient l'objet des discussions. Quand vous voulez aller aux élections, deux éléments sont essentiels. Le premier, c'est le corps électoral. Quels sont les électeurs? Comment disposent-ils des cartes d'électeur? Qui les leur donne? Combien sont-ils? Où les trouve-t-on? Après ces questions, le deuxième élément arrive: Qui s'occupe de tout cela?
La deuxième question essentielle, c'est le fichier électoral avec son concepteur, la CENI. Mais, nous n'avons obtenu aucun accord sur ces deux questions essentielles. Le reste c’est de l’habillage d’autant que ces questions ne sont pas résolues. Donc, nous avons fait un constat d'échec.
Le Collectif et l'ADP ont tiré les leçons de ce dialogue. Nous ne sommes pas en accord avec ce qui s'est passé. Nous estimons que nous allons prendre les dispositions nécessaires pour le faire savoir très rapidement. Troisième point, c’est la question des délégations spéciales. Mais, soyons sérieux ! Nous avons eu des élections, on a eu des élus locaux et des maires. Aujourd’hui, on se lève, on les remplace par des militants du parti gouvernemental, sans que cela ne soit jamais passé sur la loi. A propos, je prends toujours le cas de ma circonscription, à Boffa : 70 mille électeurs inscrits, 56 mille votants au premier tour. Je suis arrivé premier avec 36 mille voix, devant Kouyaté, Cellou, la NGR. Le RPG n’y a gagné que 616 voix. Aujourd'hui, ce sont eux qui sont devenus les responsables de la Mairie et de l'ensemble des collectivités. Comment voulez-vous que ce soit la manière dont on va aborder le processus électoral? Nous n'accepterons pas cela. Et nous le dénoncerons avec force. Nous nous préparons également pour que la communauté nationale et internationale sachent bien que nous ne sommes pas d’accord avec cela et que n’allons pas laisser faire des élections de cette manière-là. Très bientôt, nous allons vous donner les programmes de nos meetings, de nos manifestations et de la caravane que nous envisageons à travers le pays.»
Aboubacar Sylla, président de l’Union des Forces du Changement, (UFC) : «Ce dialogue a été échec total…»
«Nous nous sommes réunis pour passer en revue les conclusions et les résultats de ce dialogue, examiner la réussite ou l'échec de cet exercice auquel nous nous sommes livrés ces dernières semaines, au Palais du Peuple. Après avoir écouté les comptes-rendus de nos délégués et en examinant ce document qui fait office de relevé de conclusion de ce dialogue, sommes arrivés à une conclusion: ce dialogue a été un échec total dans la mesure où les points essentiels qui ont motivé l’organisation de ce dialogue, n’ont pas fait l'objet de consensus. L’essentiel des points dont on parle, c’est la CENI, le fichier électoral. Car, tout ce débat avait pour objectif de nous permettre de définir, de façon consensuelle, un corps électoral bien précis pour ces élections, et à coté, trouver un organe consensuel qui puisse organiser ces élections de façon transparente. Mais nous sommes arrivé à la conclusion que la volonté politique fait défaut du coté du pouvoir. Nos arguments avaient beau être pertinents, ils avaient beau être adossés sur des dispositions légales et réglementaires incontestables, ils n'ont pas été pris en compte. Parce que tout simplement, le gouvernement, le pouvoir et la CENI veulent continuer leur fuite en avant, en gérant de manière unilatérale ce processus électoral. Notre première réaction sera de publier une déclaration pour formaliser notre position. Il s’agira d’interpeller la communauté nationale et internationale en leur disant que nous ne sommes pas du tout en accord avec le pouvoir dans le cadre des préparatifs de ces élections. Et que ce dialogue sur lequel nous avions fondé beaucoup d’espoir au départ, a été un échec et a accouché d’une petite souris. Car, même les questions qui ont été l'objet de consensus sont en fait des déclarations d'intention de la part du pouvoir. Rien ne prouve que ces points seront strictement appliqués par le pouvoir. La liberté de mouvement des partis politiques sur le terrain, la neutralité de l'administration, l'accès des partis de tout bord aux médias publics, ce sont presque des vœux pieux pour qui connait le contexte guinéen…»
Il faut souligner que Lansana Kouyaté, président du Parti de l’Espoir pour le Développement National, (PEDN) à qui nous avons le premier tendu le micro, n’a pas voulu se prêter aux questions des journalistes. Arguant que «Sidya Touré, va parler», avant de se sauver à la pointe des pieds.
AfricaLog.com