Une semaine après le coup d'État en Guinée-Bissau, la junte et les partis de l'ex-opposition au régime renversé ont désigné par consensus un ancien candidat éliminé au premier tour de la présidentielle, Manuel Serifo Nhamadjo, comme président de transition.
Ce dissident de l'ex-parti au pouvoir, le PAIGC, était arrivé troisième du scrutin du 18 mars avec 15,75 % des voix, loin derrière l'ancien premier ministre Carlos Gomes Junior (48,9 %), grand favori du deuxième tour, initialement prévu le 29 avril.
À 54 ans, M. Serifo Nhamadjo était jusqu'au coup d'État président par intérim du parlement, ayant succédé à Raimundo Pereira, lui-même devenu chef de l'État par intérim à la mort en janvier du président Malam Bacaï Sanha.
Arrêté par les militaires le 12 avril, M. Pereira est toujours détenu de même que M. Gomes Junior.
Conformément à l'accord de transition conclu mercredi entre la junte et les partis, un Conseil national de transition (CNT) a été créé pour «gérer le processus de transition jusqu'à la tenue d'élections présidentielles et législatives dans un délai maximal de deux ans».
Le CNT sera présidé par Braima Sori Djalo, numéro deux du principal parti de l'ex-opposition, le Parti de la Rénovation sociale (PRS).
L'annonce de la désignation de ces nouvelles autorités de transition est intervenue au moment même où le Conseil de sécurité de l'ONU était réuni à New York pour étudier l'envoi d'une «force de maintien de la paix» en Guinée-Bissau.
Parlant au nom de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), le ministre angolais des Affaires étrangères Georges Rebelo Chikoti a invité le Conseil de sécurité à «envisager l'adoption de mesures avec pour objectif de rétablir l'ordre constitutionnel et d'obtenir la libération sans condition des dirigeants arrêtés».
Il a demandé la création d'une «force de maintien de la paix pour la Guinée-Bissau» ainsi que des sanctions pour faire pression sur les putschistes.
«Le temps presse et nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre et de laisser la population souffrir à la merci du pouvoir militaire», a ajouté le ministre angolais.
La présence et le rôle d'une force militaire angolaise, déployée en Guinée-Bissau depuis mars 2011, avaient été invoqués par l'armée pour justifier son coup d'État.
Jeudi, l'armée avait ordonné la réouverture des frontières fermées depuis le 15 avril, témoignant d'une volonté de normalisation de la situation, alors que de nombreux habitants de Bissau ont quitté la capitale pour la province dans la crainte de violences.
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a annoncé avoir pu rencontrer la veille M. Gomes Junior et l'ancien président intérimaire Raimundo Pereira. Ils «ont l'air en bonne santé», a déclaré une porte-parole du CICR.
Après l'Union africaine (UA) et la Francophonie qui avaient suspendu mardi la Guinée-Bissau de leurs rangs, la Banque mondiale et la Banque africaine de développement (BAD) ont suspendu leur aide au développement à Bissau.
Interrogé sur les éventuelles sanctions qui pourraient s'abattre sur la Guinée-Bissau, Artur Sanha, un des dirigeants du Parti de la Rénovation sociale, s'est montré confiant.
«La Cédéao (Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest), l'Union africaine, les Nations unies et les autres organisations internationales devraient louer la Guinée-Bissau pour son expérience en matière de transition du pouvoir», a-t-il déclaré.
Depuis 1999, ce pays d'Afrique de l'Ouest, considéré comme la plaque tournante du trafic de cocaïne entre l'Amérique du Sud et l'Europe, a connu pas moins de trois «transitions», après deux coups d'État (en 1999 et 2003) et l'assassinat par des militaires du président Joao Bernardo Vieira en 2009. – AfricaLog avec agence