Le Chef de l'Etat rencontre la communauté guinéenne. «Depuis que [François] Hollande est élu, je dors tranquille. Je n’ai plus de stress», révèle Alpha Condé. «Le mot d'ordre de "ville-morte" n'a pas été du tout suivi le 28 juin», se réjouit-il.
«Dr Ditinn m'a dit que Dalaba me préfère à Cellou Dalein …», rapporte l’orateur.
En séjour dans la capitale de l’Hexagone, le Président Alpha Condé a conféré hier dimanche 1er juillet avec ses compatriotes établis en Europe. Après le bain de foule, le Chef de l’Etat s’est adressé à ses concitoyens pour les édifier des réalités du pays ainsi que des progrès accomplis par son gouvernement en moins de deux ans.
Introduction liminaire: «Une femme ne peut pas mettre un enfant au monde aujourd’hui et dire que deux jours après, l’enfant doit courir. Il faut d’abord qu’il s’assoie, qu’il marche à quatre pattes, qu’il se lève et qu’il marche. Malheureusement, ventre affamé n’a pas d’oreille. Et beaucoup de cadres sont impatients.
J’ai l’habitude de dire que j’ai hérité d’un pays mais pas d’un Etat. Il n’y avait pas d’Etat en Guinée. Le peuple de Guinée est un peuple qui mérite que l’on se sacrifie pour lui.
Pour ceux qui ne connaissent pas la Guinée, vous allez à la campagne, [vous trouvez] le paysan qui n’a qu’un seul coq, je vous assure qu’il va le tuer pour vous donner à manger. Ça, c’est le peuple de Guinée».
Des cadres guinéens
«Quel est le malheur du peuple de Guinée ? Ce sont les cadres. Il y a des cadres très valables en Guinée.
J’ai fait venir un de mes amis, Konan Kouassi Lambert qui a été Ministre de l’Agriculture [en Côte d’Ivoire, NDLR]. Je lui ai dit, viens m’aider. Il est venu. Il a été à Forécariah, Coyah et à Kindia. [A son retour], il me dit "Alpha, tu n’as pas besoin d’experts étrangers. Tu as les cadres qu’il faut. Donne-leur les moyens".
Effectivement, il y a des cadres très compétents dans l’agriculture. Je vous fais remarquer que c’est ANPROCA [Agence Nationale de la Promotion Rurale et du Conseil Agricole, NDLR] qui a inventé le riz nérica qui est l’un des riz les plus performants. Mais, notre drame, c’est que les cadres compétents étaient marginalisés. Pendant ce temps, ceux qui spéculaient, n’avaient aucune pitié du peuple, aucune pitié du pays. Leur seul problème était comment piller le pays à leur profit».
Son regard sur la gestion du Président Lansana Conté
«En opposant, je combattais Conté. Depuis que je suis Président, je connais un certain nombre de réalités. Le Président Lansana Conté disait aux Ministres : "moi, je ne connais rien. Si vous pensez que c’est bien pour le pays, il faut le faire".
Le pays était à terre. Il n’y a pas d’hôtel. Il n’y a pas d’eau. Il n’y a pas d’électricité. Il n’y a pas de route. Il n’y a pas de maison. Il n’y a pas de bureau. Qui en est responsable ?»
Réponse de l’assistance: «ce sont eux [les Ministres et hauts cadres de l’époque, NDLR]».
Alpha Condé de repartir: «Ce sont ces cadres qui ont géré le pays : Premiers ministres, Ministres, etc. Donc, voilà le grand drame de la Guinée».
Pour Alpha Condé, «Les gens qui ont pillé ce pays sont responsables s’il n’y a pas d’hôtel. Le Novotel n’est pas un hôtel. On dit "quatre étoiles", ça ne vaut même pas "deux étoiles". Il n’y a pas d’hôtel, il n’y a pas de maison, il n’y a pas de route, il n’y a pas de bureau»
De l’ethnocentrisme
«Le deuxième drame, c’est l’ethnocentrisme. Quand on a un programme, on s’adresse à l’intelligence, à l’esprit : "voilà mon programme". Je vous convaincs. Quand on n’a pas de programme, on s’adresse à l’irrationnel : la religion ou l’ethnie.
Quand on forme un gouvernement : "il y a combien de peulhs, il y a combien de malinkés, il y a combien de soussous ?". Ce n’est pas la compétence qui compte, c’est l’équilibrisme ethnique. Mais ça, c’est contre le développement d’un pays.
Pour sortir du cercle vicieux, j’ai essayé maintenant de faire un concours et de faire appel à candidature. Nous avons fait un concours pour les jeunes, il y a eu 3000 candidats. Il y a 500 qui ont été admis. Qu’ils soient peulhs ou malinkés, je m’en fous. Ce sont les 500 là qui sont admis que je vais nommer.
Mais, vous êtes ici. Quand on va décider d’expulser les Guinéens, est-ce qu’on va demander : "qui est Diallo ? qui est Condé ? qui est Sidibé ? qui est Sylla ?" Non. On va expulser les Guinéens !».
De la tenue des législatives
«On m'a dit que le Gabon a fait les élections sans l'opposition, la Côte d'Ivoire a fait de même. Pourquoi pas la Guinée?
Je réponds tout simplement que je me suis battu pour instaurer la démocratie en Guinée, donc je veux une élection transparente et acceptée de tous».
De l’échec de l’appel à la "ville-morte"
«Le peuple a vu la réalité. Ce qu'ils n'ont pas pu faire en 25 ans, 11 ans ministre, c'est ce qu'on a fait en moins de 2 ans. La preuve, ils n'ont pas pu paralyser la Guinée. Le mot d'ordre de "ville-morte" n'a pas été du tout suivi le 28 juin.
Ce succès de mon gouvernement est dû à 75% au peuple, 20% au syndicat et 5% au gouvernement. Aujourd’hui nous sommes en train de changer la situation».
De l’entretien avec Amadou Oury Ditinn Diallo, leader du PUD
«Dr Ditinn [Amadou Oury Ditinn Diallo, leader du PUD, NDLR] m'a dit que Dalaba me préfère à Cellou Dalein, car leur pont tant souhaité n'a été construit que par mon gouvernement. Il y a quelques années, pour aller de Labé à Sagalé, on faisait 3 heures. Actuellement, on ne met qu’une heure».
La santé d’Alpha Conté se serait améliorée avec l’élection de François Hollande
«Vous savez, mon docteur [médecin, NDLR] est là. J’avais parfois 15.10 [de tension, NDLR]. Depuis que [François] Hollande est élu [Président de la République française, NDLR], je dors tranquille. Je n’ai plus de stress».
Et le Chef de l’Etat de se réjouir: «Le président Hollande a prouvé à Rio+20 que la France ne va plus s'impliquer dans la gestion des affaires africaines».
Le président de la République Pr. Alpha Condé a rencontré ce lundi 2 juillet aux environs de 18 heures son homologue français François Hollande à l'Elysée.
AfricaLog.com