La CENI guinéenne était au centre de la controverse lors de l’élection présidentielle de 2010. Entre les deux tours, son président Ben Sékou Sylla va tirer sa révérence le 14 septembre 2010 à Paris. Avant son décès, il avait été condamné par le Tribunal de première instance de Conakry II, à Dixinn sur une plainte d’Alpha Condé, alors candidat du RPG. Son successeur à ce poste, Loucény Camara sera également condamné sur une plainte déposée par l’UFDG. Par décret signé par le président de la transition, Sékouba Konaté, le malien Siaka Sangaré assumera la fonction de président de la CENI lors du second tour de la présidentielle.
La bataille pour le contrôle de la CENI domine à nouveau l’actualité politique. Dans l’attente de la liste officielle des 25 nouveaux commissaires de la CENI, on observe la discorde entre les hommes politiques de l’opposition.
Le 17 septembre 2012, le Conseil National de la Transition (CNT) a adopté la loi organique sur la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI). Une CENI paritaire et plutôt politique, sur la formule suivante:
- Dix (10) membres pour la mouvance présidentielle,
- Dix (10) représentants de l’opposition,
- Trois (3) de la société civile et
- Deux (2) de l’administration.
Soit au total, 25 Commissaires. Le souhait du citoyen lambda est que la future CENI soit une structure vraiment indépendante. Qu’il y ait une véritable rupture de lien entre les futurs Commissaires et leurs structures d’origine. Ce, au regard des derniersdéveloppement de la situation politique dans le pays, marquée par des appels à démission des représentants des différentes structures.
Quelques questions taraudent ainsi l’esprit. Le CNT a-t-il dû admettre qu’au sein de la CENI qu’il y ait les représentants du gouvernement? Si tel est le cas, quelles pourrait être leurs relations avec l’administration ? Est-ce des relations de subordination scientifique ou bien des relations d’indépendance ?
A l’affirmative à cette dernière question, on peut bien être amené à citer l’ex ministre de la justice français, Robert Badinter à travers la question suivante: ne seront-ils pas tenus alors à l’obligation d’ingratitude? En effet, M. Badinter avait affirmé que «le magistrat a une obligation d’ingratitude vis-à-vis de l’autorité qui le nomme. S’il ne le fait pas, il n’est pas indépendant».
Selon la loi organique adoptée par le CNT, «dans l’exercice de leur fonction, les Commissaires de la CENI ne doivent ni solliciter ni recevoir d’instructions ou d’ordre d’aucune autorité publique ou privée, y compris leur structure d’origine. Ils n’obéissent qu’à l’autorité de la loi.»
D’autre part, concernant les membres issus de formations politiques, le CNT a-t-il tenu compte des liens de subordination entre eux et leurs partis? Les partis vont-t-ils interférer dans l’exercice de leurs fonctions? Pourront-ils leur donner des instructions? Autant de paramètres qui font que la pesanteur du lien de subordination sera toujours forte.
A-t-on tenu compte de la présidence de la CENI? A quelle structure devrait revenir le poste de président de la CENI ? Aux politiques ou bien à la société civile?
Selon la loi organique adoptée par le CNT, «le Président de la CENI est élu au premier tour à la majorité absolue, parmi les Commissaires issus de la société civile. Dans le cas où aucun des candidats n’obtient cette majorité, un second tour est organisé, à l’issue duquel est élu le candidat ayant recueilli la majorité relative. Les Commissaires issus de la mouvance Présidentielle et de l’opposition désignent respectivement un (01) vice-président.»
S’il est vrai que beaucoup de zones d’ombre dans l’ancien texte, c’est-à-dire la loi 013, ont été élucidées par la présente loi organique, le législateur a laissé certaines questions à l’interprétation des autorités compétentes.
La loi ne donne pas de précision sur ce qui caractérise la mouvance présidentielle ou l’opposition. Est-on opposant parce qu’on organise des marches? Le président du PEDN, Lansana Kouyaté qui a contribué à l’élection d’Alpha Condé dont le mandat est en cours est-il de la mouvance présidentielle ou de l’opposition?
L’ADP et le Collectif (Sidya Touré, Lansana Kouyaté, Cellou Dalein Diallo, Ibrahima Sylla, Mouctar Diallo, Abé Sylla, ...) voudraient se partager les 10 postes octroyés à l’opposition. Les dirigeants des formations membres insistent sur les sacrifices consentis pour faire plier le pouvoir.
La loi dicte que «la CENI doit être composée de personnalités reconnues pour leur compétence et leur probité».
Le parti de Bah Baadiko, le seul candidat de l’élection présidentielle de 2010 qui a démontré sa probité morale en présentant volontairement la liste de ses biens à la Cour suprême a déposé la liste de son bloc politique pour représenter l’opposition à la CENI.
Le club des républicains de Kassory Fofana et autres se réclament de l’opposition et voudraient grignoter quelques postes.
Au final, selon la loi, les autorités compétentes vont sélectionner par décret les 25 Commissaires qui vont siéger à la CENI. Suspense politique…
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