L'ancien "trader voyou" d'UBS, Kweku Adoboli, jugé coupable d'une fraude ayant coûté 2,3 milliards de dollars à la banque suisse, la plus grosse de l'histoire britannique, a été condamné mardi à sept ans de prison dans une affaire qui rappelle celle du Français Jérôme Kerviel.
Le tribunal londonien de Southwark a jugé M. Adoboli coupable de deux chefs d'accusation de fraude, délit passible de dix ans de prison en Grande-Bretagne. Il l'a en revanche acquitté de quatre autres chefs de manipulations comptables.
Selon le juge, l'ex-trader âgé de 32 ans et d'origine ghanéenne qui a quitté le tribunal dans un fourgon pénitentiaire, effectuera la moitié de sa peine derrière les barreaux, avant de pouvoir bénéficier d'une remise de peine.
"Vous avez tout d'un joueur. Vous étiez arrogant au point de penser que les règles qui s'appliquent aux traders ne vous concernaient pas", a déclaré le juge Brian Keith en prononçant la sentence face à un Kweku Adoboli essuyant ses larmes.
"Votre chute est spectaculaire", a-t-il ajouté, à l'issue d'un procès entamé le 10 septembre.
"La somme est ahurissante, et a eu un énorme impact sur la banque mais aussi sur ses employés, actionnaires et investisseurs", a dénoncé de son côté Andrew Penhale, chef-adjoint du département fraude du parquet.
Dans un communiqué, UBS s'est déclarée "ravie que la procédure pénale soit parvenue à sa conclusion" et a salué le "professionnalisme" de la police et des autorités britanniques.
Qualifiant M. Adoboli de "trader voyou", l'accusation, selon qui cette fraude est la "plus grosse" de l'histoire du pays, lui reprochait d'avoir dépassé ses limites de courtage en inventant des opérations fictives et en mentant à ses supérieurs pour faire progresser son bonus et sa carrière.
Plaidant non coupable, l'ex-trader a affirmé au contraire durant son procès que ses supérieurs étaient au courant de ses activités et l'encourageaient.
"On nous disait de repousser les limites, donc nous repoussions les limites (...) Nous avons trouvé la limite, nous sommes arrivés au bord, nous sommes tombés et j'ai été arrêté", a-t-il raconté durant une audience, alors que cette affaire a ravivé la polémique sur le manque de contrôle au sein des géants de la banque d'investissement.
Les agissements de M. Adoboli, qui avaient débuté en 2008, ont duré jusqu'au moment de son arrestation le 15 septembre 2011.
L'ex-trader, qui aurait pu faire perdre jusqu'à 12 milliards de dollars à la banque, a avoué avoir "totalement perdu le contrôle" lorsque les marchés se sont retournés violemment en pleine crise de la zone euro.
Kweku Adoboli a travaillé "dans des conditions de marché extrêmement difficiles" et s'est retrouvé avec "un paquet d'argent à jouer avec très peu de supervision", a commenté son avocat, Tim Harris, qui s'est dit "naturellement déçu" par cette condamnation.
Diplômé en informatique de l'université de Nottingham (centre de l'Angleterre), Kweku Adoboli, entré comme simple stagiaire au sein de la banque, avait intégré en 2006 le département des ETF ("Exchange Traded Funds"), des produits financiers complexes adossés à l'évolution d'un indice boursier.
Grimpant les échelons, ce fils d'un ancien fonctionnaire des Nations unies à la retraite, était devenu responsable d'un portefeuille de 50 milliards de dollars, avec un seul collègue pour l'épauler.
Cette affaire rappelle celle du trader français Jérôme Kerviel, condamné en octobre en appel à cinq ans de prison dont trois ferme, ainsi qu'à 4,9 milliards d'euros de dommages et intérêts, le montant de la perte qu'il a fait subir à la Société Générale. – AfricaLog avec agence