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Farce électorale au Togo

Mar 10, 2010

Faut-il encore organiser des élections au Togo? Chaque scrutin se déroule invariablement selon le même scénario, depuis «l'ouverture démocratique» concédée au début des années 1990 par un pouvoir qui n'a jamais cessé d'être autocratique. Tricherie à grande échelle, vaines protestations d'opposants, manifestations réprimées par l'armée... La dernière présidentielle, le 4 mars, n'a pas dérogé à la règle.

Faure Gnassingbé, 43 ans, fils du général-président Gnassingbé Eyadéma, qui a dirigé pendant 38 ans ce petit pays d'Afrique de l'Ouest, l'a officiellement emporté avec 60,92 % des voix. Seul problème: Jean-Pierre Fabre, principal candidat de l'opposition, revendique entre 75 et 80 % des voix.

Le fils Eyadéma va rempiler en toute quiétude pour un second mandat. Il s'était déjà fait élire avec 60,15% des voix, à l'issue d'un scrutin tout aussi contesté, en avril 2005, deux mois après la mort de son père.

L'armée avait tiré sur les manifestants, à Lomé et dans plusieurs villes, faisant entre 400 et 500 morts, selon les Nations unies. De quoi refroidir les ardeurs des actuels opposants, pourtant décidés à «se battre» contre cet énième vol électoral. Leur manifestation, prévue pour ce mardi, a été interdite lundi. S'ils défilent, c'est à leurs risques et périls.

Le fils du général Eyadéma s'est employé, ces cinq dernières années, à asseoir son pouvoir. En avril 2009, il a fait arrêter et jeter en prison deux de ses demi-frères, Kpatcha et Essolizam, accusés mais pas jugés pour une tentative de coup d'Etat. Avant sa réélection, Faure a multiplié les manœuvres pour évincer ses rivaux.

La candidature de Kofi Yamgnane, ancien maire socialiste du village breton de Saint-Coulitz, en France, a été invalidée un mois avant le scrutin pour une question de détail concernant sa date de naissance.

L'opposition s'est auto-proclamée gagnante, dès le 5 mars, avant de dénoncer le bourrage des urnes et l'annonce de résultats sans possibilités de recoupements.

Le tout, sous les yeux de 130 observateurs de l'Union européenne (UE), qui se sont bornés à constater que «l'élection s'est déroulée dans le calme, en dépit d'un cadre non consensuel».

Faure, qui n'a que 43 ans, ferait sans doute des économies en supprimant les élections une fois pour toutes, au lieu de se faire plébisciter tous les cinq ans, pendant des décennies.

Neuf millions d'euros ont été déboursés par l'UE pour organiser cette nouvelle farce électorale, sur laquelle la France ne s'est pas encore prononcée. – Libération