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Guinée: Conakry livrée à de nouvelles exactions après les 157 morts de lundi

Sep 29, 2009

Conakry était livrée mardi à de nouvelles scènes d'exactions avec trois jeunes tués par des soldats guinéens, au lendemain d'une manifestation réprimée par les forces de l'ordre, qui ont tué 157 opposants et se sont livrées à des actes barbares.

"Nous avons enregistré aujourd'hui encore trois cas de morts par balles de l'armée" à Conakry, a déclaré le responsable de l'Organisation guinéenne de défense des droits de l'Homme (OGDH) Thierno Maadjou Sow. "Les jeunes sont sortis (dans la rue) et les militaires leur ont tiré dessus". "Il y a aussi un fait inédit, des militaires sont allés enlever les blessés en traitement à l'hôpital Donka (de Conakry) pour les emmener vers une destination inconnue ainsi que des femmes violées qui étaient en traitement au centre de santé communal de Ratoma" (banlieue de Conakry), a-t-il ajouté.

Des tirs sporadiques ont été entendus dans des quartiers populaires où les forces de l'ordre étaient massivement déployées, selon des témoins.

"Les exactions continuent dans les quartiers, perpétrés par des militaires. Même s'il n'y a personne dans la rue, ils tirent en l'air, pillent des boutiques et frappent les gens", selon un habitant.

Conakry est devenue mardi "une ville morte" où règne "une psychose liée à la présence des militaires", a déclaré à l'AFP la présidente de la fondation Colle, Chantal Colle, qui s'occupe des jeunes et des femmes en difficultés.

Au lendemain de la répression sanglante lundi des opposants rassemblés par dizaines de milliers au plus grand stade de Conakry par les forces de l'ordre, la junte au pouvoir en était accusée mardi d'avoir provoqué un "massacre".

Le bilan des 157 victimes de lundi pourrait encore s'alourdir, plusieurs sources ayant accusé les militaires d'avoir ramassé des corps pour dissimuler le véritable bilan. Les manifestants s'étaient réunis pour dire leur opposition à l'éventuelle candidature à la présidentielle prévue en janvier du chef de la junte, le capitaine Moussa Dadis Camara, arrivé au pouvoir en décembre.

Les forces de l'ordre ont tiré sur la foule et plusieurs sources les ont accusées de s'être livrées ensuite à de véritables scènes de barbarie. "Les militaires ont publiquement et en pleine journée violé des femmes, les ont déshabillées et ont tiré par balles sur leur sexe", a raconté à l'AFP un témoin, Abdoulaye Bineta Diallo. Ces violences continuaient mardi, selon une ONG et des témoins.

"Nous avons des informations très inquiétantes de femmes détenues dans des camps militaires et des commissariats qui sont violées", a déclaré Mamadi Kaba, président de la branche guinéenne de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l'Homme (Raddho). Le chef de la junte, qui s'enorgueillait d'être arrivé au pouvoir sans violences, a dit être "très désolé". Il s'est rendu mardi dans deux hôpitaux de Conakry pour rencontrer de nombreux blessés hospitalisés après les évènements de lundi, selon des témoins.

Un opposant historique, Alpha Condé, à la tête du Rassemblement du peuple de Guinée (RPG) a prévenu que la population manifesterait jusqu'au départ "du pouvoir criminel".

Paris, Washington, Londres, Dakar, l'ONU, l'Union européenne, l'Union africaine, la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), ont condamné ces violences. L'Alliance pour la démocratie au Mali (Adéma, principal parti politique au Mali, mouvance présidentielle) a réclamé mardi le départ du chef de la junte en Guinée, pays qui vient de vivre des "heures d'horreurs dignes des pires fascistes".

La France, ex-puissance coloniale, a décidé la suspension immédiate de sa coopération militaire avec la Guinée et réexamine l'ensemble de son aide bilatérale. A sa demande, l'UE doit se réunir mercredi "pour examiner les mesures complémentaires (...) qui pourraient être prises rapidement".

A New York, le secrétaire d'Etat français à la coopération, Alain Joyandet, a alerté mardi le Conseil de sécurité de l'ONU sur la situation "très préoccupante" en Guinée. - AFP