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Hillary Clinton au département d'Etat, un pari risqué pour Obama

Dec 01, 2008

Barack Obama, qu'inspire l'idée d'Abraham Lincoln de regrouper des adversaires au sein de son administration, va prendre sans doute certains risques en choisissant de nommer secrétaire d'Etat Hillary Clinton, avec laquelle il a croisé le fer pendant des mois au fil des primaires, et de reconduire Robert Gates, un républicain, à la tête du Pentagone.

Obama admire chez Hillary Clinton sa rigueur dans le travail, déclarent les collaborateurs du président élu, et il espère que le statut de star de l'ex-First Lady l'aidera à améliorer l'image de l'Amérique dans le monde après huit ans de présidence Bush.

C'est lundi qu'Obama compte dévoiler la composition de son équipe de sécurité nationale, dont Hillary Clinton, donnée comme future secrétaire d'Etat. L'autre choix très attendu est celui de Robert Gates, actuel secrétaire à la Défense dans l'administration Bush et républicain, qui devrait être maintenu à son poste au Pentagone.

Obama apprécie beaucoup la méthode d'Abraham Lincoln qui consistait à réunir de fortes personnalités, parfois rivales, pour favoriser des débats pointus. Il espère que cette stratégie - décrite dans le livre "Team of Rivals", de l'historienne Doris Kearns Goodwin - débouchera sur la prise de décisions viables et mûrement réfléchies.

Mais faire appel à Hillary Clinton pourrait créer bien des problèmes à Obama. Certains politologues notent qu'elle garde tous ses soutiens au sein du Parti démocrate et n'a sans doute pas renoncé à ses ambitions présidentielles.

"C'est quelqu'un qui a failli devenir chef de l'Etat", fait remarquer Reginald Dale, du Centre d'études stratégiques et internationales. "Elle reste une figure majeure de la scène politique et estime probablement qu'elle devrait devenir présidente. Elle cherchera sans doute à faire valoir ses propres points de vue".

Nombre d'experts citent en exemple les relations étroites qui unissaient l'ancien secrétaire d'Etat James Baker à son président, George Bush père. Ils notent en revanche que l'actuel président George Bush a eu des relations beaucoup plus distantes avec son premier secrétaire d'Etat, Colin Powell. Cela avait eu pour conséquence de réduire la marge de manoeuvre de Powell à l'étranger et, à la Maison blanche, l'équilibre du pouvoir a penché du côté du vice-président, le "faucon" Dick Cheney.

"Lorsque les dirigeants étrangers parlaient à Baker, ils savaient qu'ils parlaient en fait au président Bush (père), et ils savaient que ce dernier défendrait Baker face à ses adversaires aux Etats-Unis et face aux manoeuvres des gouvernements étrangers", écrit Thomas Friedman, éditorialiste au New York Times.

TENDRE LA MAIN À L'IRAN ?

Hillary Clinton a beau avoir soutenu Obama et fait campagne avec force pour lui après la phase des primaires, elle n'a jamais été proche de lui et certains dirigeants étrangers se demanderont peut-être, lorsqu'ils la recevront, si elle parle réellement au nom du président des Etats-Unis, écrit Friedman.

Hillary Clinton n'est toutefois pas la seule forte personnalité qu'Obama devrait nommer lundi au sein de son équipe chargée des questions de sécurité nationale.

Le général en retraite James Jones, ancien commandant de l'Otan, a de bonnes chances d'être nommé conseiller à la sécurité nationale de la Maison blanche. Et le secrétaire à la Défense Robert Gates, qui a servi sous plusieurs administrations républicaines, devrait être maintenu au Pentagone.

Cet ancien directeur de la CIA, qui a été conseiller adjoint à la sécurité nationale sous George Bush père, rejoint Obama sur certains dossiers comme l'Afghanistan, où il est partisan lui aussi de renforcer le contingent américain, et sur Guantanamo, où il préconise également la fermeture de la prison.

Sur d'autres dossiers, en revanche, il diverge avec le futur président américain, avec lequel il pourrait traverser des passes difficiles. Ainsi, sur l'Irak. Obama entend retirer le contingent américain - actuellement 146.000 hommes - dans les 16 mois consécutifs à son entrée en fonctions en janvier. Gates, lui, préconise une diminution régulière des effectifs américains mais a récusé ces derniers mois toute idée de calendrier de retrait et toute précipitation.

Sur l'Iran, de même, Gates devra expliquer pourquoi il ferait partie d'une administration qui envisage un dialogue direct avec les dirigeants de Téhéran, approche envers laquelle il a fait montre du plus grand scepticisme.

"J'ai pris part aux recherches de l'insaisissable Iranien modéré tout au long de ces trente dernières années", a-t-il déclaré, pince-sans-rire, en septembre dernier. "Chaque administration depuis la révolution iranienne a tendu la main aux Iraniens d'une façon ou d'une autre et cela n'a jamais abouti", avait-il ajouté - sans toutefois s'opposer au principe d'un dialogue avec l'Iran.

Gates est d'ailleurs le cosignataire, en 2004, d'un rapport qui préconisait de tendre la main au gouvernement réformiste du président d'alors, Mohammad Khatami. Selon lui, les perspectives de dialogue constructif resteront minces tant que son successeur, Mahmoud Ahmadinejad, sera au pouvoir. - Reuters