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La Guinée en route vers sa première élection libre

May 15, 2010

La Guinée entre officiellement en campagne, lundi, pour la première élection présidentielle libre de son histoire, prévue le 27 juin et attendu avec impatience par la majeure partie de la population qui veut en finir avec les dictatures civiles et militaires.

Ce pays d'Afrique de l'Ouest compte 124 partis agréés. Mais, à ce jour, seuls quelques uns de leurs dirigeants ont annoncé qu'ils seraient candidats.

Mais ils semblent pressés d'en «découdre» car, avant même l'ouverture de la campagne, certains ont sillonné le pays ou tenu des meetings à l'étranger.

La Guinée n'a jamais connu de scrutin libre, transparent et ouvert, depuis son indépendance en 1958.
Dans cette ancienne colonie française, la présidence du «père de l'indépendance», Ahmed Sékou Touré, s'était mue en dictature, faisant au moins 50 000 morts en 26 ans, selon les organisations de défense des droits humains.

Le pays a ensuite connu les 24 années de régime militaire de l'autocrate Lansana Conté (1984-2008), puis d'amères désillusions avec la junte dirigée par le capitaine Moussa Dadis Camara.
La dernière présidentielle, en 2003, a été un plébiscite forcé pour le général Conté, réélu avec 95% des voix face à un unique adversaire, le chef d'un petit parti quasi inconnu. Les leaders de l'opposition boycottaient le scrutin, faute de garanties de transparence.

Depuis, Conté est mort de maladie, fin 2008, et de jeunes officiers ont pris les commandes du pays, suscitant d'abord l'espoir puis un malaise croissant.

Le 28 septembre 2009, le massacre d'au moins 156 opposants par les forces de sécurité à Conakry a marqué une rupture terrible. Quelques mois plus tard, le capitaine Camara a été victime d'une tentative d'assassinat.

Et c'est le général Sékouba Konaté qui a été chargé de présider «la transition» devant conduire le pays à la présidentielle.

Bénéficiant d'un soutien international appuyé, Konaté s'est maintes fois «engagé» à ne pas être candidat, pas plus que les membres de la junte et du gouvernement.

Les jeux semblent donc ouverts pour les «leaders» civils de l'opposition, dont trois sortent du lot: Cellou Dalein Diallo (ex-premier ministre en 2004-2006), Alpha Condé et Sidya Touré (ex-premier ministre en 1996-1999).

Chacun d'eux possède un fief électoral solide où il règne en maître: le nord peulh pour Cellou Dalein Diallo, l'est mandingue (malinké) pour Alpha Condé et l'ouest Atlantique (soussou) pour Sidya Touré.
Si les deux premiers ont les faveurs des pronostics, M. Touré est un outsider sérieux qui pourrait créer la surprise.

L'ancien premier ministre François Lonsény Fall a également annoncé sa candidature. Un autre ancien chef du gouvernement, Lansana Kouyaté, pourrait aussi se présenter, tout comme l'opposant Mamadou Bah Bâadiko.

Pour les commentateurs politiques, le choix des Guinéens se fera largement sur des critères ethniques, compte tenu de la «politique ethnocentriste» des précédents régimes.

Mais «voir les Guinéens aller aux urnes pour vraiment élire le président de leur choix sera un tournant décisif de l'histoire du pays», dit à l'AFP le président de l'Organisation guinéenne de défense des droits humains, Thierno Maadjou Sow.

Tandis que dans la ville de Kankan (600 km à l'est de Conakry), la syndicaliste Touré Fatoumata Kéita n'hésite pas à proclamer que le 27 juin sera le «jour de la résurrection de la Guinée». «Le jour où, dit-elle, je serai fière d'être guinéenne». – AFP