La vaste réforme du système de santé américain défendue par Barack Obama a franchi une première étape importante mercredi au Sénat, avec l'adoption en commission d'une mesure visant à élargir le dispositif d'assurance maladie. Mais le chemin s'annonce pavé d'embûches, le dossier divise, et le chef de la Maison Blanche jette toutes ses forces dans la bataille.
Il fait pression pour que le Congrès boucle son travail avant les vacances parlementaires d'août, et lui présente un texte définitif à signer au début de l'automne. Par 13 voix contre 10, la commission des Affaires sanitaires du Sénat a approuvé une mesure de 615 milliards de dollars (437 milliards d'euros) en vertu de laquelle les Américains auraient à contracter une assurance santé, et leurs employeurs à contribuer à son coût. Ce texte prévoit aussi une assistance financière, sous forme de primes d'assurances, aux foyers gagnant moins de quatre fois l'équivalent du seuil de pauvreté aux Etats-Unis (environ 88.000 dollars/62.000 euros par an pour une famille de quatre personnes). A la différence d'autres pays développés, le système de santé des Etats-Unis n'offre pas un couverture maladie à l'ensemble des citoyens. A l'heure actuelle, près de 50 millions d'Américains ne sont pas assurés, soit environ un sixième de la population. Le gouvernement fournit des soins médicaux aux déshérités, aux personnes âgées et à certains anciens combattants, mais la plupart des Américains doivent compter sur une assurance privée, habituellement via leur employeur. Ce n'est cependant pas le cas pour l'ensemble des habitants, et contracter une assurance n'est pas à la portée de tous les portefeuilles. La réforme de ce système, priorité de Barack Obama, n'est pas du goût de tous. Et le fossé se creuse au Congrès, où le vote de mercredi n'a donné lieu à aucun "oui" républicain: si les démocrates sont déterminés à avancer, les républicains eux n'ont pas de mots assez forts pour exprimer leurs craintes. Le président américain a lui lancé un nouvel appel à l'efficacité: le vote de mercredi "devrait nous rendre pleins d'espoir, mais sans nous pousser à la complaisance", a-t-il commenté depuis les jardins de la Maison Blanche. Il devrait plutôt donner le sens de l'"urgence à la Chambre des représentants et au Sénat pour boucler leur travail crucial sur la réforme de santé avant les vacances (parlementaires) du mois d'août". Le président souhaite que les parlementaires aboutissent à un compromis et puissent déposer un texte définitif dès cet automne. Mais, conscient des difficultés, il étaye son message par le biais d'entretiens télévisés, disant que la réforme ne peut plus attendre. Et expliquant aux employeurs que la réforme les contraindra à offrir une couverture médicale aux salariés, sous peine de pénalités. Parallèlement, son ancienne organisation de campagne -Organizing for America, désormais fondue dans le Parti démocrate- a lancé une série de spots télévisés sur le système de santé, dont la diffusion devait commencer dès mercredi. Dans ces spots de 30 secondes, des citoyens évoquent les problèmes auxquels ils ont été confrontés en matière de couverture médicale et estiment qu'il est temps d'agir. Pour se donner toutes les chances de mener à bien ce qui est l'un des plus vastes chantiers du début de sa présidence, Barack Obama se met en quatre pour convaincre les parlementaires, multipliant interventions dans les médias et contacts directs. Jeudi, il devait encore rencontrer deux sénateurs dont le vote est susceptible de faire pencher la balance en faveur de la réforme. Mais des républicains, qu'il a vus mercredi, l'ont mis en garde. "Je l'ai exhorté à ne pas précipiter l'examen de la loi", a ainsi expliqué la sénatrice Susan Collins, redoutant que le "processus n'entraîne de profondes divisions". Son collègue Judd Gregg, a lui parlé de "catastrophe pour les Américains". Le président soutient un plan d'assurance maladie fédéral pour concurrencer les assureurs privés, mais n'aspire pas à revenir sur le système d'allocations santé parrainé par les employeurs. Il est favorable à un coût total se maintenant aux alentours de 1.000 milliards sur dix ans. Après le vote de la commission sénatoriale de la Santé, celle des Finances doit à son tour dévoiler sa propre approche du dossier, avant qu'un projet combinant les deux textes ne soit soumis au vote du Sénat. Son président, le démocrate Max Baucus, -que Barack Obama a poussé à avoir un texte prêt à la fin de la semaine- veut décrocher aussi l'aval des républicains. Du côté de la Chambre des Représentants, trois commissions planchent sur le sujet. Des votes étaient prévus jeudi à la commission de l'Education et du travail et à celle des finances, qui doivent se prononcer sur un plan de 1.500 milliards de dollars, présenté cette semaine par la majorité démocrate à la Chambre, et visant à assurer une couverture santé à la quasi-totalité des Américains. Une troisième commission (Energie et commerce) doit aussi examiner la mesure jeudi, mais un consensus risque d'y prendre du temps. AP