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L'avocat Thierry Lévy interdit de monter dans un avion pour Libreville

Jan 09, 2009

Défenseur de Gabonais qui ont été écroués pour «propagande» contre le régime d'Omar Bongo, il lui a été signifié que son visa avait été annulé.

«Sans précédent», selon l’avocat William Bourdon, qui pourtant en a vu d’autres. Ce matin, son confrère, Me Thierry Lévy, défenseur des Gabonais écroués la veille pour «propagande», a été «empêché» en fin de matinée par la police aux frontières (PAF) à Roissy de prendre un avion pour Libreville. Me Lévy était en salle d’embarquement quand les policiers sont venus lui signifier que son visa de quatre jours avait été annulé in extremis par les autorités gabonaises «pour raisons de sécurité».

En réalité, l’affaire dite des «biens mal acquis» est en train de prendre des proportions inattendues. Le 2 décembre dernier, l’association anti-corruption Transparency international et un ressortissant gabonais, Gregory Ngbwa Mintsa, déposaient une plainte à Paris visant les présidents gabonais, congolais et équato-guinéen sur l’acquisition de biens immobiliers en France. La famille Bongo posséderait ainsi 39 propriétés en France, notamment à Paris.

Un militant demande des comptes sur la gestion financière du Gabon Une première plainte avait auparavant été classée sans suite par la justice française. Mais, cette fois, la constitution de partie civile, grâce à l’implication d’un citoyen gabonais, pourrait entraîner la désignation d’un juge d’instruction par la justice française.

Très inquiètes, les autorités de Libreville ont alors décidé de réagir sans ménagement. Fin décembre, le plaignant Gregory Ngbwa Mintsa (défendu par Me Bourdon), deux activistes de la société civile et deux journalistes étaient arrêtés et placés en garde à vue. Quatre d’entre eux ont été incarcérés hier pour «propagande» en vue de déstabiliser le régime.

On leur reproche d’avoir eu en main une lettre ouverte au président gabonais Omar Bongo, publiée en décembre par Bruno Ben Moubamba, responsable en Europe du réseau d’ONG gabonaises «Acteurs libres de la société civile». Ce dernier y demande notamment «des comptes sur la gestion financière du pays depuis 40 ans».

Une affaire qui risque de gêner considérablement Paris Toute cette affaire risque de gêner considérablement Paris, déjà en délicatesse avec plusieurs pays africains suite à des enquêtes judiciaires ouvertes en France (Angola, Djibouti, etc.). Omar Bongo, au pouvoir depuis 1967 à Libreville - un record en Afrique - est en effet l’un des meilleurs alliés de la France sur le continent.

Le «doyen», comme il aime à se faire appeler, connaît toutes les arcanes du pouvoir en France, et se plaît à rappeler qu’il est devenu chef de l’Etat lorsque de Gaulle était à l’Elysée. Et le président Bongo n’hésite pas à évoquer les largesses dont il fait profiter ses amis à Paris, de gauche comme de droite. Le 6 mai 2007, il fut le premier dirigeant étranger à féliciter Nicolas Sarkozy de vive voix pour son élection. Deux mois plus tard, ce dernier se rendait à Libreville pour son premier déplacement sur le continent. - Liberation