Un prix Confucius de la paix, qui se veut une alternative chinoise au prix Nobel, a été attribué cette année au président zimbabwéen Robert Mugabe, pourtant objet de vives critiques de la part des défenseurs des droits de l'homme.
À la suite du dirigeant russe Vladimir Poutine (2010) ou encore de l'ex-président cubain Fidel Castro (2014), le très discret prix Confucius récompense donc encore une fois une personnalité controversée.
Qiao Damo, fondateur d'un obscur «Centre chinois d'études internationales pour la paix», organisation qui décerne le prix, a expliqué jeudi que Robert Mugabe avait été retenu pour ses «contributions exceptionnelles à la paix mondiale».
Le dirigeant africain nonagénaire a été préféré à neuf autres finalistes, dont le milliardaire Bill Gates, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon ou encore la présidente sud-coréenne Park Geun-hye, a-t-il ajouté.
«Si (Mugabe) n'était pas arrivé au pouvoir en 1980, quel talent aurait été gâché!», s'est exclamé M. Qiao, pointant sa capacité à «stabiliser le Zimbabwe» en établissant «un ordre (...) bénéfique au peuple», mais aussi à «promouvoir la paix en Afrique» en occupant la présidence tournante de l'Union africaine.
De quoi faire enrager les ONG de défense des droits de l'homme et l'opposition zimbabwéenne, qui n'ont de cesse de dénoncer la brutale répression menée par Mugabe contre ses détracteurs et l'effondrement économique résultant de son arbitraire politique.
«Mugabe, tel que nous le connaissons et tel que les Zimbabwéens en ont fait l'expérience, est un va-t-en-guerre et un sadique qui se délecte de la misère de son peuple», a déclaré Gorden Moyo, secrétaire général du Parti démocratique populaire (mouvement d'opposition) sur le site d'informations Bulawayo24.
Pour lui, remettre ce prix à Mugabe est une «absurdité»: «Les organisateurs devraient avoir honte de récompenser des meurtriers qui se déguisent en pacifistes».
«C'est normal qu'il y ait eu un peu de "désordre"» au Zimbabwe sous Mugabe, réplique Qiao Dama. «Quand les États-Unis ont été fondés, la situation était très chaotique. Et le Zimbabwe a été fondé il y a 30 ans seulement».
Le prix Confucius est apparu en 2010, après la remise du prix Nobel de la paix au dissident chinois emprisonné Liu Xiaobo, ce qui avait provoqué la fureur de Pékin.
Il s'agissait, selon M. Qiao, d'établir une alternative «asiatique» à un Nobel «trop extrême et ne reposant pas sur des faits objectifs».
Le prix Confucius sera cette année accompagné d'une récompense de 500 000 yuans (environ 77 000 dollars), financée par un homme d'affaires sous couvert d'anonymat.
Interrogée, Mme Hua Chunying, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, a assuré jeudi que ce prix Confucius «n'était en aucun cas affilié au gouvernement». L'ambassade du Zimbabwe à Pékin s'est refusée à tout commentaire. – AfricaLog avec agence