La justice française a infligé mercredi un nouveau revers à la présidente du Front national, Marine Le Pen, dans le combat qui l'oppose à son père Jean-Marie, cofondateur du parti d'extrême droite, en suspendant le congrès par correspondance organisé pour le priver de son titre de président d'honneur.
La semaine dernière, la justice avait déjà annulé la mise à l'écart de Jean-Marie Le Pen en tant qu'adhérent, décrétée par le parti à l'initiative de sa fille.
Ces épisodes judiciaires s'inscrivent dans le conflit entre le père et la fille dont l'entreprise de «dédiabolisation» du parti irrite profondément le vieux tribun, âgé de 87 ans.
Sa suspension du parti le 4 mai avait été provoquée par de nouvelles déclarations provocantes sur la Shoah et l'immigration.
Dans leur décision rendue publique mercredi, les juges des référés (procédure d'urgence) du tribunal de grande instance de Nanterre, près de Paris, suspendent la consultation des adhérents organisée jusqu'à vendredi par voie postale «jusqu'à organisation d'une assemblée générale extraordinaire conforme aux statuts actuellement applicables».
Le parti a «violé» ses règles internes en organisant ce congrès par correspondance, et non sous forme physique comme cela devrait être le cas pour une modification des statuts - notamment la suppression de la présidence d'honneur, estiment les juges.
Jean-Marie Le Pen, suspendu du parti jusqu'à jeudi dernier, n'a pas été en mesure de «s'exprimer», relève en outre la justice, tant sur le mode de consultation choisi par le FN que face aux adhérents «faute de débat» les rassemblant «physiquement» autour de la question des statuts.
Le tribunal n'a donné aucun délai au FN pour organiser une nouvelle assemblée.
Le Front national «va faire appel», selon son avocat Frédéric-Pierre Vos.
Le FN avait minimisé la première victoire de Jean-Marie Le Pen, rétabli en tant qu'adhérent la semaine dernière, estimant que le congrès voterait inévitablement la suppression de son titre qui le rendait membre de droit de toutes les instances internes, «à vie» selon lui.
Ce congrès, qui s'appuie sur quelque 51 500 adhérents en majorité acquis à la cause de Marine Le Pen, aurait dû sans grande surprise voter la suppression de la présidence d'honneur du «Menhir», le surnom donné à Le Pen père.
Pour tenter de sauver sa fonction, M. Le Pen avait donc attaqué le congrès lui-même à quelques jours de la fin du vote.
«Je suis satisfait, la justice me donne raison», a réagi Jean-Marie Le Pen. «Je combats l'injustice dans mon combat politique, et même quand j'en suis la victime». «Le jugement disqualifie cette méthode (par correspondance). Ça devrait porter les (militants) à réfléchir», a-t-il ajouté.
«Je n'ai pas à revenir en grâce, moi je suis à ma place», a-t-il affirmé, se disant prêt à la discussion pour restaurer «l'unité du mouvement absolument indispensable à quelques semaines des élections régionales et à quelques mois des élections présidentielles» (en réalité prévues en 2017).
Marine Le Pen a récemment annoncé sa candidature à un scrutin régional en décembre qu'elle voit comme un tremplin vers la présidentielle de 2017. Dans cette perspective, elle a depuis son accession à la tête du parti en 2011 pris ses distances avec l'héritage sulfureux légué par son père, condamné à plusieurs reprises pour propos antisémites et racistes.
Elle a cependant conservé la ligne générale du parti, marquée par des positions nationalistes et anti-immigrés.
Élue - comme son père - au Parlement européen, Marine Le Pen est parvenue il y a quelques semaines à y créer un groupe parlementaire en réunissant des membres de sept nationalités. – AfricaLog avec agence