La mort du chef suprême des Tigres tamouls, Velupillai Prabahakaran, a scellé lundi la défaite de la rébellion face à l'armée régulière sri-lankaise, qui affirme contrôler désormais l'ensemble de la zone de guerre du nord-est du pays. L'Union européenne a appelé à une enquête indépendante sur d'éventuels crimes de guerre commis à l'encontre des populations civiles.
La mort de Prabhakaran, annoncée par la télévision publique, a été confirmée par des messages SMS envoyés par les services d'information du gouvernement sur les téléphones portables du pays. Deux de ses plus proches lieutenants, Soosai, le chef de la marine tamoule, et Pottu Amman, le commandant des services de renseignements, ont été tués à ses côtés. Cette annonce a suscité des rassemblements festifs dans le pays, la foule envahissant les rues de la capitale, Colombo, en chantant et en dansant. La mort de Prabhakaran est le dernier symbole de la défaite de l'armée des Tigres de libération de l'Eelam tamoul (LTTE), après plus de 25 ans de guerre civile. Héros pour ses hommes, il était le dirigeant d'un groupe classé parmi les organisations terroristes par les Etats-Unis et l'Union européenne. Le chef de l'armée sri-lankaise, le général Sareth Fonseka, a annoncé lundi qu'il n'y avait plus aucun rebelle tamoul dans la zone de guerre. Il a précisé que ses soldats avaient nettoyé les dernières poches de résistance dans le nord. "Nous pouvons annoncer avec grande responsabilité que nous avons libéré le pays tout entier du terrorisme", a-t-il déclaré à la télévision publique. Le président sri-lankais Mahinda Rajapaksa a confirmé la mort de Prabhakaran lors d'une conversation téléphonique avec le ministre indien des Affaires étrangères Pranab Mukherjee, a déclaré dans un communiqué le porte-parole de ce dernier, Vishnu Prakash. Le chef des Tigres tamouls et ses lieutenants se trouvaient à bord d'un camion blindé suivi par un autocar transportant des rebelles, et circulant en direction des forces régulières sri-lankaises, lundi matin, ont expliqué des responsables, sous couvert d'anonymat. Il s'en est suivi un violent échange de tirs de deux heures avant que l'armée régulière n'atteigne le camion blindé avec une roquette, selon les mêmes sources. Le fils aîné de Prabhakaran, Charles Anthony, chef présumé de l'aviation des LTTE, a aussi été tué, selon l'armée. Par ailleurs, les forces spéciales ont trouvé les corps de trois autres hauts responsables de l'organisation rebelle. La communauté tamoule était désespérée, selon Suren Surendiran, porte-parole du Forum britannique des Tamouls, plus grande organisations d'expatriés en Grande-Bretagne. "Les gens sont très sombres et très tristes. Mais nous sommes toujours déterminés et désireux de continuer notre lutte pour l'Eelam", a-t-il déclaré, utilisant le nom donné par les Tamouls à un Etat indépendant. Les pays de l'Union européenne ont appelé lundi à une enquête indépendante sur d'éventuels crimes de guerre commis à l'encontre des populations civiles, sans préciser à quelle autorité devait être confiée cette mission. "Les responsables doivent être traduits en justice" ont déclaré les ministres des Affaires étrangères de l'UE, réunis à Bruxelles, dans un communiqué commun. Le Britannique David Miliband a précisé qu'il y avait des "accusations très graves" de crimes de guerre des deux côtés et qu'ils devaient être "soumis à une enquête correcte". "Désormais nous faisons face (...) à une situation humanitaire extrêmement difficile", a souligné la commissaire chargée des Relations extérieures, Benita Ferrero-Waldner. "Ce que nous demandons, c'est que les Nations unies aient accès aux civils", a-t-elle ajouté, assurant que la commission européenne était prête à accorder une aide supplémentaire, après les 3 millions d'euros versés à la Croix rouge internationale au mois d'avril. Les ministres européens ont appelé les autorités sri-lankaises à chercher la réconciliation avec la minorité tamoule. "L'avenir du Sri Lanka dépendra de sa capacité à construire une société intégrant l'ensemble de ses citoyens", a souligné le ministre suédois des Affaires étrangère Carl Bildt. Les Tigres tamouls ont pris les armes en 1983 pour la création d'un Etat indépendant pour la minorité tamoule, opprimée selon eux par le gouvernement représentant la majorité cinghalaise. Le conflit a fait environ 70.000 morts. AP