Le fils aîné du président américain Donald Trump a admis mardi avoir volontairement rencontré l'an dernier une avocate qui lui avait été présentée comme une émissaire du gouvernement russe en possession d'informations potentiellement compromettantes sur Hillary Clinton.
La révélation des circonstances de ce rendez-vous, qui a eu lieu en juin 2016 à New York, a renforcé les soupçons de ceux qui craignent que le premier cercle du président américain se soit coordonné, ou ait tenté de le faire, avec la Russie afin de battre la candidate démocrate à la Maison Blanche.
Ces accusations de collusion font l'objet d'enquêtes du procureur spécial Robert Mueller et de plusieurs commissions du Congrès. Le milliardaire les a toujours dénoncées comme une cabale.
Devançant leur divulgation imminente par le New York Times, Donald Trump Jr., 39 ans, a publié sur Twitter quatre pages de messages échangés en juin 2016 avec un intermédiaire britannique nommé Rob Goldstone.
Rob Goldstone est un agent musical représentant le chanteur Emin Agalarov, qui connaît Donald Trump. Son père Aras Agalarov, un milliardaire russe ayant fait fortune dans l'immobilier, a organisé le concours Miss Univers, détenu par l'Américain, en 2013 à Moscou, et il a eu un projet de construction de Trump Tower dans la capitale russe, finalement tombé à l'eau.
Dans un message du 3 juin 2016, M. Goldstone informe le fils Trump que le procureur général de Russie a proposé à Aras Agalarov de "donner à la campagne Trump des informations et documents officiels qui incrimineraient Hillary et ses transactions avec la Russie et qui seraient très utiles à votre père".
"Ce sont évidemment des informations de très haut niveau et sensibles, mais qui font partie du soutien de la Russie et de son gouvernement pour M. Trump", écrit Rob Goldstone.
"Si c'est ce que vous dites, j'adore (l'idée), surtout plus tard cet été", a répondu Donald Jr..
L'héritier, vice-président du groupe familial et conseiller actif de son père, ne perd pas de temps.
Il organise un rendez-vous à la Trump Tower le 9 juin 2016 avec une avocate russe venue de Moscou et présentée par M. Goldstone comme "avocate du gouvernement russe", Natalia Veselnitskaya. La rencontre a lieu dans ses bureaux, en compagnie du gendre de l'actuel président, Jared Kushner, et de son directeur de campagne, Paul Manafort - soulignant l'importance accordée à l'entrevue.
"La femme, comme elle l'a dit publiquement, n'était pas une responsable gouvernementale", a déclaré Donald Jr. dans un communiqué, ajoutant pour sa défense qu'elle n'avait finalement "pas d'information à donner" et voulait en réalité parler de la loi américaine Magnitski sanctionnant des Russes pour des violations de droits de l'homme.
Avant les révélations, il n'avait pas parlé à son père de la rencontre, car "il n'y avait rien à rapporter", a-t-il dit mardi soir dans une interview sur Fox News.
"Mon fils est une personne de grande qualité et j'applaudis sa transparence", a quant à lui déclaré le président Trump, dans un court communiqué lu par sa porte-parole.
De son côté, Natalia Veselnitskaya a nié être liée au gouvernement russe et déclaré, dans une interview à NBC, qu'elle n'avait pas les informations recherchées par le trio. "Ils les voulaient vraiment", a-t-elle dit.
Le Kremlin a pour sa part démenti la connaître.
Mais pour les démocrates du Congrès, c'est le principe même d'avoir accepté une offre de renseignements présentés comme émanant du pouvoir russe qui est problématique, quelle qu'ait été la réalité des informations évoquées ou des liens de l'avocate avec le pouvoir russe.
"Quand quelqu'un reçoit un message disant que le gouvernement russe veut aider à faire élire son père, et qu'une avocate du gouvernement russe arrive de Moscou pour le voir, toute personne normale tirerait le signal d'alarme et appellerait les forces de l'ordre", a déclaré le sénateur démocrate Tim Kaine, ancien colistier d'Hillary Clinton.
L'attitude de Don Jr. ajoute aux soupçons, l'homme ayant initialement expliqué que le rendez-vous avait pour sujet la suspension des adoptions d'enfants russes par des familles américaines, décrétée en représailles à la loi Magnitski.
Il est acquis que Donald Jr. sera appelé à s'expliquer devant les parlementaires, sous un format et un calendrier qui restent à définir.
"C'est très problématique", a réagi le sénateur républicain Lindsey Graham, bien que de nombreux républicains tentent parallèlement de minimiser le scandale.
La rencontre a eu lieu à une époque où le grand public ignorait encore que le parti démocrate avait été piraté; les messages internes dérobés ne seront diffusés que plusieurs semaines plus tard. L'administration Obama attendra octobre avant de publiquement accuser la Russie de piratages. - AfricaLog avec agence