Un scientifique nucléaire iranien a été exécuté en Iran pour espionnage au profit des États-Unis, plus de cinq ans après avoir été au coeur d'une affaire rocambolesque impliquant des accusations d'enlèvement par la CIA.
L'Iran considère toujours les États-Unis comme son principal «ennemi» et le guide suprême Ali Khamenei répète qu'il ne faudrait pas leur faire «confiance», malgré le rapprochement opéré à la faveur d'un accord en 2015 sur le programme nucléaire controversé iranien.
L'exécution de Shahram Amiri, 39 ans, dont on était sans nouvelles depuis 2010, a été annoncée dimanche par le porte-parole de la justice iranienne Gholamhossein Mohseni-Ejeie lors d'une conférence de presse.
«Cette personne avait accès aux informations secrètes et même top secret du régime et s'était mise en relation avec notre principal ennemi, le grand Satan, les États-Unis. Elle livrait à l'ennemi des informations top secret et vitales du pays», a déclaré Mohseni-Ejeie.
«Amiri a été pendu», a-t-il dit, sans préciser ni où ni quand.
Le scientifique iranien avait disparu en juin 2009 en Arabie saoudite où il se trouvait en pèlerinage. Il avait refait surface en juillet 2010 aux États-Unis en demandant à rentrer en Iran. Il avait alors été accueilli à bras ouverts par les officiels iraniens.
Mais rien depuis jusqu'à l'annonce de son exécution.
M. Mohseni-Ejeie a précisé qu'Amiri avait été «condamné à mort par le tribunal de première instance, conformément à la loi». Il avait «fait appel du verdict mais la Cour suprême a confirmé la peine» de mort.
«Non seulement il ne s'est pas repenti mais il a essayé d'envoyer de fausses informations depuis l'intérieur de la prison, et il a finalement été puni», a poursuivi le responsable iranien.
Selon lui, «les États-Unis ont été dupés par notre système de renseignement. Les renseignements américains croyaient que l'Iran n'avait pas d'informations sur le transfert de cet individu en Arabie saoudite et sur ce qu'ils faisaient. Mais nos services de renseignement étaient au courant de tout».
Interrogé à Washington, le département d'État a refusé de s'exprimer sur le sujet.
M. Mohseni-Ejeie a en outre accusé la famille du scientifique de «mensonge». Après sa pendaison, «sa famille a affirmé qu'il avait été condamné à une peine de prison, ce qui est totalement faux».
En juillet 2010, à son retour en Iran, Amiri avait déclaré avoir été détenu aux États-Unis pendant plus d'un an après avoir été «enlevé» en Arabie saoudite par deux agents de la CIA parlant le persan. Ce que les États-Unis avaient démenti.
Quelques semaines avant de regagner son pays, il était apparu dans plusieurs vidéos.
Dans la première, il affirmait avoir été enlevé par les renseignements américains et saoudiens; dans la seconde, il disait s'être rendu de son plein gré aux États-Unis pour poursuivre ses études; dans la troisième, il affirmait que sa vie était en danger aux États-Unis et qu'il voulait retourner en Iran.
Fin mars 2010, la chaîne américaine ABC avait affirmé que le scientifique iranien avait fait défection et collaborait avec la CIA. Au lendemain de son retour en Iran, le New York Times écrivait, en citant des responsables américains, qu'il avait été pendant des années un informateur de la CIA en Iran.
À cette époque, la crise était à son comble entre les Occidentaux et l'Iran était accusé de chercher à fabriquer l'arme atomique.
Entre janvier 2010 et janvier 2012, cinq scientifiques iraniens ont été assassinés à Téhéran. Les autorités iraniennes ont mis en cause les services de renseignement américains, israéliens et britanniques.
L'Iran et les États-Unis n'ont pas de relations diplomatiques depuis 1980.
Mais ces dernières années, les chefs de la diplomatie des deux pays ont opéré un léger rapprochement en menant des discussions dans le cadre des négociations nucléaires entre l'Iran et les pays du groupe 5+1 (États-Unis, France, Royaume-Uni, Russie, Chine et Allemagne).
Cette exécution intervient alors que les dirigeants iraniens multiplient les critiques à l'égard des États-Unis. Le président modéré iranien Hassan Rohani a affirmé mardi que les États-Unis avaient gâché l'occasion de l'accord nucléaire en ne respectant pas totalement leurs engagements, notamment pour faciliter la normalisation des relations commerciales entre l'Iran et le reste du monde. Téhéran accuse Washington de maintenir des pressions sur les grandes banques internationales. – AfricaLog avec agence