Youssouf Fofana, accusé avec 26 autres personnes du rapt, de la séquestration et de l'assassinat en 2006 d'Ilan Halimi, jeune Français juif, s'est montré provocant à l'ouverture du procès du "gang des barbares" à Paris.
A son arrivée dans le box des accusés de la cour d'assises, le chef présumé du groupe, un Français d'origine ivoirienne de 28 ans, a fait un signe, souriant, à la salle où avaient pris place la famille et les proches de la victime. Il leur a lancé en arabe "Allahu Akbar!" ("Dieu est grand!"). Lors de l'interrogatoire formel d'identité par la présidente Nadia Ajjan, l'accusé, portant la barbe et vêtu d'un survêtement blanc, a déclaré s'appeler "Arabs - Africaine révolte armée barbare salafiste". Il a dit être né le 13 février 2006 à Sainte-Geneviève-des-Bois (Essonne), jour et lieu de la mort d'Ilan Halimi. La présidente n'a pas relevé. L'accusé, souriant, s'est rassis et semblait ensuite prier à voix basse. A l'extérieur de la cour, des groupes de jeunes ont scandé "Ilan, justice !" et provoqué de petites échauffourées. Cette affaire avait suscité un vif émoi en France et fut emblématique à la fois des violences dans les banlieues et d'un antisémitisme dénoncé par la communauté juive nationale . Le procès se déroulera à huis clos jusqu'au 10 juillet, deux accusées étant mineures au moment des faits, malgré l'opposition de la mère d'Ilan Halimi qui souhaitait la publicité des débats . La défense de Youssouf Fofana avait également demandé un procès public mais elle a fait volte-face au début des débats et s'en tient donc au huis clos . PROCES SOUS TENSION Les auditions des accusés, de 162 témoins et 50 experts programmées se tiendront donc sans public et sans presse. Dix-neuf accusés comparaîtront détenus, et neuf jeunes filles figurent parmi les accusés. Ces jeunes Français, pour certains d'origine maghrébine, portugaise, ou africaine étaient chômeurs ou étudiants. Ils sont jugés pour avoir participé à l'enlèvement, avoir servi de "geôliers", ou avoir gardé le silence sur la séquestration. llan Halimi, 23 ans, avait été enlevé le 20 janvier 2006 à Sceaux (Hauts-de-Seine), où il avait été attiré dans un guet-apens par une jeune fille servant d'"appât". Après de vaines négociations avec sa famille, qui avait prévenu la police, pour une rançon de 450.000 euros et une séquestration violente de trois semaines émaillée de tortures dans une cave d'immeuble, il avait été retrouvé agonisant près d'une gare RER dans l'Essonne. Il est mort à l'hôpital. Une grande manifestation, marquée par des incidents, avait été organisée par les organisations confessionnelles juives et antiracistes, à Paris, le 26 février 2006. Devenu un symbole, Ilan Halimi a été inhumé à Jérusalem en février 2007. Youssouf Fofana reconnaît avoir mené l'enlèvement et la séquestration mais nie avoir tué Ilan Halimi à coups de couteau, comme le soutient l'accusation. Il encourt la réclusion à perpétuité. "C'est un être humain qu'on va juger. M. Fofana est maltraité par une campagne de marketing politique et religieux, il doit pouvoir parler", a déclaré l'un de ses avocats, Isabelle Coutant-Peyre, à des journalistes. Me Francis Szpiner, avocat de la mère d'Ilan Halimi, a regretté le huis clos. "Nous estimons que c'est le silence qui a tué Ilan Halimi et nous souhaiterions que la justice brise enfin ce mur de silence", a-t-il dit. "Si respecter la loi, c'est mettre en péril la justice, je me demande dans quelle époque on vit", a répondu à l'audience l'avocat général Philippe Bilger. La circonstance aggravante de l'antisémitisme a été retenue contre Fofana et un autre accusé, malgré l'opposition initiale du parquet de Paris qui considérait alors le crime comme crapuleux. – Reuters