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Affaire Kieffer : cacophonie autour de l’audition de Simone Gbagbo

Apr 24, 2009

Deux juges enquêtant sur la disparition de Guy-André Kieffer ont entendu, jeudi, à Abidjan, l’épouse du chef de L’Etat ivoirien. Son entourage est soupçonné d’avoir commandité le rapt du correspondant de presse dont le corps demeure introuvable.

Elle en a fait une question de préséance. A mille lieux du fond de l’épineux dossier opposant la France et la Côte-d’Ivoire. Simone Gbagbo, l’épouse du chef de l’Etat ivoirien, a bien été entendue, jeudi, à Abidjan, par les juges français chargés de la disparition toujours non élucidée, en avril 2004, de Guy-André Kieffer. Le journaliste franco-canadien travaillait alors sur des malversations supposées dans la filière du cacao auxquelles auraient été mêlés certains cadres du régime Gbagbo, liés aux milieux économiques.

C’est peu dire que la première dame ivoirienne est très à cheval sur le protocole, elle qui s’était pourtant affranchie d’une convocation de la justice française, à Paris, voici quelques semaines. Des mois que ses conseils, Mes Georges Kiejman et Pierre Cornut-Gentille, négocient pied à pied avec Patrick Ramaël et Nicolas Blot, les deux magistrats français, sur les conditions de son audition, déterminante dans la recherche de la vérité judiciaire pour laquelle continue de se battre la femme du disparu, Osange Silou-Kieffer, ainsi que ses soutiens, rédacteurs d’une lettre ouverte récemment expédiée à Nicolas Sarkozy.

Chargés d’élucider la disparition de Guy-André Kieffer dit « GAK », fin connaisseur des arcanes du pouvoir abidjanais, les juges ont bataillé ferme pour s’assurer la pleine coopération de Mme Gbagbo, donnant, mercredi soir, in extremis, son accord de principe via son avocat, Me Kiejman, annonçant, sans rire, « une concession de la première dame » enfin disposée à être entendue au sein de la Cour suprême ivoirienne, exigeant jusqu’alors de témoigner « chez elle »… Paul-Antoine Bohoun Bouabré, le ministre d’Etat chargé du Plan, ayant déposé, jeudi, en début d’après-midi, dans la même enceinte, sans que rien ne filtre de l’audition.

« Susceptibilités réciproques »

Quelques heures plus tôt, au nom de son auguste cliente, Me Kiejman avait menacé de tout annuler au prétexte d’un « manque de réalisme » des juges et d’un « problème de susceptibilités réciproques ». Une allusion à peine voilée au coup d’Etat manqué contre Laurent Gbagbo, en septembre 2002, dont Abidjan tient toujours Paris pour responsable.

Arrivés, dimanche, à Abidjan, Patrick Ramaël et Nicolas Blot ont entendu, mercredi, Seka Yapo Anselme, chargé de la sécurité de la première dame, et Patrice Baï, à l’époque chef de la sécurité de la présidence, notamment mis en cause par le beau-frère de Mme Gbagbo, Michel Legré, revenu, depuis, sur ses déclarations.

Cinq ans après les faits, le fond du dossier demeure toujours aussi embrouillé. Depuis sa disparition, le 16 avril 2004, « GAK » n’a plus jamais donné signe de vie. Il aurait mis au jour des bizarreries financières dans le secteur du cacao impliquant des personnalités proches du palais présidentiel. Toujours est-il qu’il n’a jamais reparu après qu’il eut été vu, pour la dernière fois, sur un parking de supermarché de la capitale économique ivoirienne alors qu’il avait rendez-vous avec Michel Legré, le beau-frère de Simone Gbagbo, l’un des rares protagonistes de ce dossier à avoir été mis en examen pour « enlèvement » et pour « séquestration en bande organisée ». Tout comme Jean-Tony Oulaï, soupçonné, lui, d’avoir dirigé le commando auteur de l’enlèvement, actuellement en détention provisoire en France.

Diffamation ?

Selon des sources proches du dossier, le chauffeur d’Oulaï, Berté Seydou, aurait rapporté aux magistrats-instructeurs un entretien téléphonique de son patron avec Simone Gbagbo au moment où le rapt de « GAK » était commis. Crime de lèse-majesté. L’intéressée a porté plainte en diffamation contre ce témoin vivant en France, visé, depuis fin 2008, par un mandat d’arrêt international émis par la justice ivoirienne. Pour toute réponse publique, l’épouse de Laurent Gbagbo a toujours réfuté, la main sur le cœur, une quelconque participation à l’enlèvement de l’encombrant journaliste. Dans son autobiographie parue en 2007, intitulée à dessein Paroles d’honneur, la bouillante épouse de Laurent Gbagbo avait fustigé des « calomnies », distillées, selon elle, par ses « ennemis ». – France Soir