Le tribun Jacob Zuma semblait jeudi assuré de devenir le quatrième président noir d'Afrique du Sud, les résultats partiels des élections de la veille donnant une confortable avance à son parti, le Congrès national africain (ANC).
Ultra majoritaire depuis la chute de l'apartheid, l'ANC se trouvait à nouveau largement en tête du scrutin avec plus de 62% des voix sur 2,3 millions de bulletins dépouillés à 05H00 GMT (10% du total), selon la Commission électorale L'Alliance démocratique (DA, ex-opposition sous l'apartheid) disposait pour sa part de 20% des voix, suivie par le Congrès du Peuple (Cope, formé en décembre par des dissidents de l'ANC) avec 7,5%. L'ANC, qui jouit d'une forte légitimité hérité de son combat contre l'ancien régime ségrégationniste, semblait donc certaine de décrocher un nouveau mandat de cinq ans au pouvoir. Selon toute logique, son chef Jacob Zuma, 67 ans, qui vient de bénéficier d'un abandon de poursuites pour corruption à son encontre, devrait être élu président de la République lors d'une séance extraordinaire du Parlement, le 6 mai. Les déboires judiciaires de cet autodidacte charismatique et les turbulences liées aux luttes intestines au sein de l'ANC -- qui ont culminé par la démission forcée du président Thabo Mbeki en septembre -- n'ont pas découragé les électeurs sud-africains. "La participation a été massive" et l'ambiance "pacifique", "teintée de bonne humeur" et "patiente", relevaient jeudi tous les quotidiens en reproduisant des photos de longues files d'attente qui s'étaient formées la veille devant les bureaux de vote. "Ce sont des images dont nous pouvons tous être fiers", soulignait le journal à grand tirage The Star. "Elles donnent la chair de poule parce qu'elles pourraient facilement avoir été prises en 1994." A l'époque, la majorité noire votait pour la première fois et 87% du corps électoral s'était rendu aux urnes pour porter au pouvoir le héros de la lutte anti-apartheid et Nobel de la Paix Nelson Mandela. Cette fois encore, "les gens se sont déplacés en masse pour faire entendre leur voix", poursuivait le Star. "Maintenant, c'est au tour des hommes politiques d'être à la hauteur de leurs promesses." "La tâche pour Zuma et l'ANC est claire: il y a toujours d'énormes niveaux de pauvreté, de chômage et de criminalité dans notre société (...) C'est l'heure de se retrousser les manches et de se mettre au travail", ajoute le Star. Depuis 1994, plus de deux millions de logements sociaux ont été construits, l'eau courante, l'électricité et des sanitaires décents installés dans de nombreux quartiers. Mais des millions de personnes, surtout dans la majorité noire, habitent dans des bidonvilles. Environ 43% de la population vit toujours avec moins de deux dollars par jour et le taux de chômage frôle les 40%. Le gouvernement a également échoué à résorber une criminalité record, responsable de 50 homicides par jour, et à freiner la propagation du sida qui affecte 5,5 des 48 millions de Sud-Africains. Pendant la campagne, Jacob Zuma a promis de s'attaquer à ces fléaux, mais sa mission sera compliquée par la crise mondiale. L'Afrique du Sud, première économie du continent, devrait entrer en récession pour la première fois en 17 ans. Plus de 300.000 licenciements sont attendus dans l'année. Autre motif d'incertitude: "pendant la campagne, Zuma s'est distingué en disant aux électeurs potentiels ce qu'ils avaient envie d'entendre", relève le quotidien Business Day. "Inévitablement, il y aura des déçus." - AFP