Electrisés par l'apparition surprise de Nelson Mandela, plus de 100.000 militants du parti au pouvoir en Afrique du Sud ont fêté dimanche, dans l'euphorie et avec anticipation, la victoire prévisible du Congrès national africain (ANC) aux élections générales de mercredi.
L'arrivée du héros de la lutte anti-apartheid emprisonné durant 27 ans et premier président noir du pays a suscité une forte clameur dans le stade d'Ellis Park, au centre de Johannesburg. "Mandela ! Mandela ! Personne n'est comme toi", ont scandé d'une seule voix des militants extatiques, tandis que le Nobel de la Paix -- qui à 90 ans limite de plus en plus ses apparitions publiques -- se frayait un chemin à bord d'une petite voiture de golfe. Au micro, un animateur peinait à faire entendre son message de bienvenue: "Amandla! Amandla ! ("pouvoir", cri de ralliement de l'ANC sous l'apartheid), Nelson Mandela est ici!" Sa présence a quasiment éclipsé la vedette annoncée: le chef de l'ANC Jacob Zuma, qui devrait accéder à la présidence de la République à l'issue du scrutin de mercredi. L'ANC, qui jouit d'une majorité absolue depuis les premières élections multiraciales de 1994, dispose de plus de 60% des intentions de vote, selon les sondages. Pour cette raison, le rassemblement de dimanche baptisé Siyanqoba (victoire, en zoulou) ressemblait plus à une célébration qu'à un meeting de campagne. "Je suis venu assister au triomphe de mon parti. Nous nous préparons à la victoire", expliquait Themba Zimu, un médecin de Soweto, en agitant un drapeau en l'honneur de l'ANC. "Rien ne peut nous arrêter. L'ANC va gagner les élections et Jacob Zuma deviendra notre président", ajoutait ce père de famille, âgé de 46 ans. Sur le podium, les responsables de l'ANC et ses partenaires communistes et syndicalistes se sont succédé avec la même assurance, clamant successivement: "l'ANC va gagner le scrutin de mercredi", "nous allons enregistrer une victoire écrasante"... Loin de cette autosatisfaction, Nelson Mandela a rappelé l'ANC à ses devoirs. Trop frêle pour prendre la parole au micro, il a lancé dans un message pré-enregistré: "alors que nous nous efforçons d'assurer une victoire décisive pour notre organisation (...), nous devons nous rappeler que notre première tâche est d'éradiquer la pauvreté !" Un message assuré de faire mouche dans un pays où, quinze ans après la chute de l'apartheid, 43% de la population vit toujours avec moins de deux dollars par jour. Après l'avoir écouté religieusement, la foule a d'ailleurs explosé en applaudissements. "La présence de Mandela nous montre que les soi-disant dissensions au sein de l'ANC ne sont rien du tout", a ensuite commenté Keith Duma, une quadragénaire arborant l'effigie de Jacob Zuma sur son T-shirt. "Il est avec nous, c'est ce qui compte." Le parti a été traversé l'an dernier par des luttes de pouvoir qui ont entraîné la démission forcée en septembre du président Thabo Mbeki. Celui-ci était absent dimanche contrairement à son successeur Kgalema Motlanthe et d'autres dignitaires comme Winnie Mandela, ex-épouse de l'ancien président. - AFP