Après une semaine de concertation avec son état- major, le patron des Forces Nouvelles, Guillaume Soro, a fait une déclaration dans laquelle il s’est engagé au désarmement des troupes avant l’élection présidentielle. Ce désarmement, a-t-il précisé, se fera avant l’élection présidentielle prévue entre avril et mai.
Le camp présidentiel est entré dans une campagne active de déstabilisation de ses adversaires en remettant en cause la crédibilité de la CEI (Commission électorale indépendante), dont il a obtenu la tête du président. Dans la foulée, le parti du président Gbagbo a exigé et obtenu le renouvellement de tous les démembrements de la CEI. Ce processus est à peine entamé que le FPI (Front populaire ivoirien) annonce que les listes électorales seront auditées alors que le contentieux électoral est également en cours. Pour ajouter du piment à la situation, le FPI met volontairement la pression sur les Forces Nouvelles afin que celles-ci hâtent le désarmement de leurs hommes. C’est dans un tel contexte qu’intervient la déclaration du Premier ministre Soro, qui se veut rassurant. Le processus DDR, promet-il, sera achevé un mois avant les élections. Il a dû certainement peser le pour et le contre d’une telle annonce avant de la rendre publique. Car il y a un risque qu’il ne tienne pas promesse. Jusqu’à preuve du contraire, la date de cette élection est indicative et elle n’engage que ceux qui y croient vraiment.
Le Premier ministre n’a pas annoncé un scoop en réalité. Cette déclaration est conforme à l’accord de Ouagadougou qui veut que les élections aient lieu après le DDR (Désarmement- Démobilisation-Réinsertion). Mais l’effet recherché de cette annonce est de prendre l’opinion à témoin sur les bonnes dispositions des Forces Nouvelles pour une sortie de crise qui n’a que trop duré. Le processus DDR a toujours été le point d’achoppement dans le calendrier de mise en Å“uvre de l’accord de Ouagadougou. Le clan Gbagbo sait très bien que sur ce sujet, les Forces Nouvelles sont intransigeantes. C’est la raison principale de cette revendication du désarmement actuellement, alors que la nouvelle CEI se remet du changement intervenu en son sein. Les Forces Nouvelles doivent leur position aujourd’hui aux armes qu’elles ont prises en 2002 contre le pouvoir de Gbagbo. Vont-elles se priver d’un tel moyen de pression alors qu’après 8 ans de crise, la confiance reste la chose la moins partagée ?
Malgré les promesses de Soro, il est évident que si la confiance ne revient pas rapidement entre les protagonistes, le désarmement ne sera ni total, ni parfait parce que finalement en Eburnie, tout le monde est devenu un peu boulanger. C’est pour cette raison qu’il faut se garder de croire béatement aux hommes politiques ivoiriens. Ils avancent toujours masqués et comme dans un jeu de poker, les cartes qu’ils annoncent ne sont jamais les mêmes à l’arrivée. La preuve, malgré toutes leurs bonnes intentions affirmées et réaffirmées,le pays attend toujours cette élection présidentielle synonyme de fin de crise. En tout état de cause, Guillaume Soro, par cette déclaration, remet la balle dans le camp présidentiel et prend à témoins le peuple ivoirien et la communauté internationale. Un mois avant la prise du décret présidentiel convoquant le corps électoral, le Premier ministre désarmera ses troupes. Soro remet Gbagbo face à ses responsabilités. A malin, malin et demi, pourrait-on dire. Assurément, on tourne en rond, fait du sur place et la Côte d’Ivoire court le risque de toucher le fond. – Le Pays