« Le pouvoir ne s’hérite pas, il se mérite ». Avec cette simple phrase Karim Wade, le fils du président, a troublé la presse sénégalaise qui y a vu une belle manipulation. Et si l’explication était plus loufoque ?
Aussi effervescente que pugnace, la presse sénégalaise a pris un coup de chaud à la lecture le 12 juillet d’une dépêche de l’APS (agence de presse sénégalaise pour les initiés).
Daté de Paris (écrit à Paris dans le jargon des agenciers), l’article a vu pour la première fois le fils du président sénégalais, et néanmoins ministre, Karim Wade, répondre à la question qui agite tous les cafés sénégalais depuis au moins 3 ans. Abdoulaye, le père, va-t-il faire hériter à son fils, du trône de président ?
Karim Wade ambitieux…pour son pays Nardo Réponse de l’ancien banquier d’affaires dans le texte « le pouvoir ne s’hérite pas il se mérite. Il n’est pas dans l’intention du Président de la République, Maître Abdoulaye Wade, ni dans mon intention de procéder à une dévolution monarchique du pouvoir (…) Ceux qui évoquent cette tentative de dévolution monarchique du pouvoir et font des accusations ignorent tout de l’histoire du Sénégal (…) la faculté de désigner le successeur du Président Wade, le moment venu, sera dévolue au peuple sénégalais (… ) toute personne qui veut accéder à la magistrature suprême doit sillonner le pays pour présenter son projet et sa vision du Sénégal et les Sénégalais, en toute liberté et de manière transparente, décideront oui ou non de lui faire confiance ». Bref Karim, s’il ne dément pas une « certaine ambition pour son pays », comme il aime à le dire, ne la trace que dans le sillon démocratique et des urnes. Un brin rassurant.
Transition démonarchique
Mais un peu pinailleuse la presse sénégalaise s’est étonné du ton, de la localisation, et surtout des circonstances du speech de Wade Junior,« qui s’entretenait avec une télé américaine ». Jusqu’à, à l’instar de notre confrère et ami Madiambal Diagne, patron du groupe de presse le plus indépendant du pays, à s’interroger sur une éventuelle manoeuvre du camp présidentiel.
Chafouin du barouf, autant que respectueux des journalistes sénégalais qui ont formé l’auteur de ses lignes, Bakchich s’est penché sur l’origine de la déclaration… Match nul ! Ni tromperie de Gorgui, ni faux procès de la presse locale. Seulement un manque de précision de l’agence de presse.
Petit retour sur les circonstances de l’imbroglio. De passage à Paris, où ses troupes paradent pour le 14 juillet, le président Abdoulaye Wade reçoit une équipe de journaliste américain à la résidence de l’ambassadeur à Paris, rue Vineuse, dans le XVIe.
Sous la haute férule de Ben Moses (réalisateur de Good Morning Vietnam) ou de Larry Diamond (professeur à Stanford et patron du Hoover Insitute), les Yankees se sont piqués de tourner un documentaire sur la transition démocratique à travers le monde. Et passant par la question africaine, se sont arrêtés devant la maison Wade, questionnant père et fils au débotté. Sous les yeux d’une vieille et glorieuse connaissance de la presse française, l’ancien africaniste du Monde et de Libération Stephen Smith, conseiller de la production pour la partie africaine. Et de cette entretien est née la dépêche imprécise de l’APS, qui a mentionné une télé américaine, quand il s’agissait d’un documentaire. Péché véniel… Qui a empêché les grattes-papiers sénégalais de gloser sur l’aspect le plus loufoque de l’histoire.
Un intervieweur au sang royal
Prévu pour être finalisé en 2011, le documentaire bénéficie d’une guest star, menant elle-même les interviews des personnalités politiques appelés à y intervenir. Un « anchorman »…au sang royal. Soit Moulay Hicham lui-même alias le Prince rouge du Maroc, neveu de feu Hassan II et cousin de sa très grâcieuse Majesté Mohammed VI. Et la presse sénégalaise de passer à côté d’une scène surréaliste. Un Prince marocain avide du trône demandant à un fils de président sénégalais s’il espérait une transition démocratique. L’Union Africaine en marche. – Bakchich