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Ultimatum international: Gbagbo résiste

Dec 17, 2010

Laurent Gbagbo doit se plier sans délai au verdict des urnes sous peine d'encourir des sanctions européennes et d'avoir affaire au tribunal pénal international, a déclaré vendredi Nicolas Sarkozy.
Le président ivoirien sortant et son épouse "ont leur destin entre leurs mains", a dit le chef de l'Etat français lors d'une conférence de presse à l'issue du Conseil européen.

Si Laurent Gbagbo n'a pas quitté "avant la fin de la semaine" le poste qu'il continue d'occuper "en violation de la volonté du peuple ivoirien, ils seront nommément sur la liste des sanctions" européennes, a ajouté Nicolas Sarkozy.

Les ministres des Affaires étrangères européens ont décidé lundi d'imposer des sanctions ciblées contre Laurent Gbagbo et ses proches, qui refusent de reconnaître la victoire d'Alassane Ouattara à l'élection présidentielle du 28 novembre.

Cela consiste à interdire de visa vers l'Union européenne les personnes faisant obstruction au processus de réconciliation nationale en Côte d'Ivoire et à geler leurs avoirs.

Le Conseil européen a confirmé vendredi dans ses conclusions la détermination de l'UE à prendre de telles mesures "contre ceux qui continueraient à faire obstruction à la volonté souveraine exprimée par le peuple ivoirien".

Le Conseil rappelle aussi que la Cour pénale internationale peut poursuivre les personnes responsables d'actes de violence, comme ceux qui ont fait jeudi au moins une vingtaine de morts à Abidjan, selon un porte-parole du président sortant.

Nicolas Sarkozy a lui-même rappelé que cette possibilité et souligné que c'était à Laurent Gbagbo de choisir l'image qu'il voulait laisser dans l'histoire.

Une liste de 19 noms

"Est-ce qu'il veut laisser l'image d'un homme de paix ? il est encore temps mais le temps presse et il doit partir", a dit le président français. "Ou est-ce qu'il veut laisser l'image de quelqu'un qui a fait tirer sur des civils parfaitement innocents ? Et, dans ce cas-là, il y a des juridictions internationales comme la Cour pénale."

Il a précisé que ce n'était pas seulement la position de la France mais aussi celle l'Europe "unanime", des Etats-Unis et du Conseil de sécurité des Nations unies. Il n'y a pas d'autre possibilité pour M. Gbagbo que de quitter à bref délai un pouvoir qu'il usurpe", a-t-il insisté.

Selon une source diplomatique à Bruxelles, une liste de 19 dirigeants ivoiriens et de proches existe déjà. Elle comporte le nom de Laurent Gbagbo mais entre crochets.

L'Allemagne, la Grande-Bretagne et la Pologne poussent pour que cette liste soit confirmée en l'état lundi prochain, lors d'une réunion technique à Bruxelles.

"Le contenu en sera déterminé en fonction de l'évolution de la situation sur le terrain et des responsabilités de chacun", a expliqué jeudi la porte-parole adjointe du ministère français des Affaires étrangères, Christine Fages.

Quelque 15.000 ressortissants français vivent en Côte d'Ivoire, une ancienne colonie qui a longtemps été un des plus fidèles alliés de la France en Afrique

La France entretient également dans le pays un dispositif militaire, baptisé Licorne, qui compte actuellement environ 950 hommes, essentiellement à Abidjan. Déployé depuis une tentative de coup d'Etat en 2002, il intervient en soutien de la mission des Nations unies dans le pays (Onuci) mais peut servir aussi à assurer la sécurité des Français.

Laurent Gbagbo sous forte pression après les violences meurtrières

L'Union européenne, la France et les Etats-Unis sont montés d'un cran dans la pression sur le président sortant ivoirien Laurent Gbagbo qu'ils somment désormais de quitter très rapidement le pouvoir, au lendemain de violences meurtrières à Abidjan contre les partisans de son rival Alassane Ouattara.

Jeudi de onze à une trentaine de personnes, selon les bilans, ont été tuées et au moins 80 blessées lorsque des partisans d'Alassane Ouattara ont tenté de marcher sur la télévision d'Etat, la RTI.
Vendredi, les dirigeants de l'UE ont exhorté l'armée à "se placer sous l'autorité du président démocratiquement élu, Alassane Ouattara", reconnu par la communauté internationale comme le vainqueur de l'élection controversée du 28 novembre.

Pour Nicolas Sarkozy, président de l'ex-puissance coloniale française, M. Gbagbo doit partir "avant la fin de la semaine", sans quoi il figurera "nommément" sur la liste des personnes visées par des sanctions de l'UE, gel d'avoirs et restrictions de visas.

Déjà jeudi, les Etats-Unis - qui ont autorisé le départ de leur personnel d'ambassade non-essentiel en poste à Abidjan - avaient affirmé que Gbagbo disposait d'un "temps limité" pour céder la place.
Le président de la Commission de l'Union africaine, Jean Ping, est arrivé vendredi dans la capitale économique ivoirienne pour tenter une nouvelle médiation dans l'espoir d'éviter le pire à la Côte d'Ivoire, déchirée par une quasi-guerre civile en 2002-2003 et coupée en deux depuis lors.

Après un entretien avec le représentant de l'ONU dans le pays Choi Young-jin, il a rencontré Laurent Gbagbo, avant Alassane Ouattara. Il n'a pas fait de déclaration à sa sortie.

L'UA avait aussi reconnu la victoire de Ouattara. Mais plutôt qu'une médiation, le Premier ministre kényan Raila Odinga, a suggéré le "recours à la force militaire" pour déloger Gbagbo. Moscou a appelé à éviter les violences.

Vendredi après-midi, dans Abidjan quadrillée par les forces fidèles à Gbagbo, rien ne signalait une nouvelle mobilisation des partisans de Ouattara, malgré l'appel à reprendre la marche sur la télévision d'Etat tentée jeudi.

"C'est trop dangeureux pour sortir", confiait un militant de Ouattara au QG de ce dernier à Abidjan, le Golf hôtel. "La peur est là", disait un autre au siège de sa coalition, dans le même quartier chic de Cocody, qui abrite aussi la radio-télévision RTI.

Dans le quartier populaire et pro-Ouattara d'Abobo (nord), très calme alors qu'il avait été le théâtre d'importantes manifestations jeudi, des habitants s'étaient attroupés autour des corps de deux jeunes hommes tués d'une balle dans la tête, étendus sur la route, a constaté un journaliste.

Il n'était pas possible dans l'immédiat de savoir dans quelles circonstances ils avaient été tués.
Le quartier d'Adjamé (nord) offrait le même spectacle que celui de Yopougon (sud, fief de Gbagbo): patrouilles des forces de l'ordre partout, activité très réduite. A Treichville (sud), les rues s'animaient peu à peu, même si les commerces restaient fermés.

Le Premier ministre de Ouattara, le chef de l'ex-rébellion des Forces nouvelles (FN) Guillaume Soro, avait appelé jeudi la population à marcher de nouveau sur la RTI, symbole et atout majeur du camp Gbagbo, ainsi que sur le siège du gouvernement.

Mais les locaux de la RTI étaient cernés par un impressionnant déploiement d'au moins une centaine de gendarmes, militaires et policiers, avec un véhicule blindé garé à l'entrée.

Les partisans de Ouattara n'avaient pas réussi à converger vers le grand bâtiment bleu, bloqués par les Forces de défense et de sécurité (FDS) loyales à Gbagbo, qui ont dans certains quartiers tiré sur la foule.

Le gouvernement Ouattara n'avait pu sortir du Golf hôtel et vendredi matin, les FDS tenaient toujours le barrage limitant l'accès à l'établissement que les FN n'avaient pas réussi faire sauter jeudi, malgré de violents échanges de tirs.

Dans l'intérieur du pays la tension est également montée. Les ex-rebelles venus du nord s'étaient affrontés jeudi aux FDS à Tiébissou (centre) en tentant, en vain, de descendre sur la capitale politique Yamoussoukro. – AfricaLog avec agence