Pour la première fois de son histoire, la Mauritanie a été le théâtre d'un attentat-suicide commis samedi par un jeune homme qui s'est fait exploser près de l'ambassade de France à Nouakchott, blessant légèrement deux gendarmes français et une Mauritanienne.
Une source policière a assuré samedi soir à l'AFP que le kamikaze était un Mauritanien né en 1987 et "formellement identifié comme un membre de la mouvance jihadiste". Dimanche, au premier jour de la semaine dans la République islamique de Mauritanie, ex-colonie française indépendante depuis 1960, la vie s'écoulait de nouveau paisiblement dans la capitale. Dans les rues dépourvues de barrages, les véhicules militaires étaient rares. Les responsables sécuritaires interrogés par l'AFP ne souhaitaient pas s'exprimer. Mais des passants s'effrayaient de cette nouvelle action visant des étrangers, un mois et demi après l'assassinat d'un Américain revendiqué par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). "Nous sommes des musulmans tolérants", insistait Aicha Sy, une "ménagère". "Celui-là (le kamikaze) na plus lâme mauritanienne, du fait du lavage de cerveau quil a subi hors de notre pays. Ils disent que cest dans le désert algéro-malien..." Le jeune terroriste présumé s'est tué samedi soir en actionnant une ceinture d'explosifs, au passage de deux gendarmes mobiles français affectés à la sécurité de l'ambassade de France. Ces Français qui terminaient leur jogging ont été légèrement blessés par des éclats et par le souffle de l'explosion, selon la Direction générale de la gendarmerie française, de même qu'une Mauritanienne. A Paris, le parquet antiterroriste a aussitôt ouvert une enquête. Des enquêteurs français s'étaient déjà rendus en Mauritanie, fin 2007, quand quatre touristes français y avaient été tués par des Mauritaniens présumés proches d'Aqmi. La France a "réaffirmé" dimanche "sa détermination à lutter contre le terrorisme aux côtés des autorités et du peuple mauritanien". Le secrétaire d'Etat français à la Coopération, Alain Joyandet, a pour sa part affirmé : "je crois que l'attentat est surtout en relation avec l'élection du président Mohamed Ould Abdel Aziz qui a indiqué qu'il était déterminé à s'attaquer à Al-Qaïda". "Evidemment la France s'est réjouie de cette position, donc, dire que la France est visée, on ne peut pas dire le contraire". Pour le journaliste mauritanien Isselmou Ould Moustapha, qui suit les questions de terrorisme pour Tahalil Hebdo, c'est bien la France qui était visée du fait notamment de "l'appui fort fourni au Mali" contre Al-Qaïda. "Dans le nord du Mali, depuis l'exécution d'un otage britannique (en juin), les unités d'Al-Qaïda sont soumises à de fortes pressions de la part de l'armée malienne - soutenue par la France - et de milices arabes" a assuré ce journaliste interrogé par l'AFP. "Du coup, des jeunes qui étaient regroupés dans des camps d'entraînement et des bases mobiles au nord Mali, rentrent dans leurs pays : l'Algérie, le Tchad, le Niger ou la Mauritanie" a-t-il assuré. Dimanche, le pays attendait la réaction de son nouveau dirigeant, l'ex-général putschiste Mohamed Ould Abdel Aziz, qui avait renversé il y a un an le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi, avant d'être élu en juillet à la tête de l'Etat. "Il s'agit chez nous d'un terrorisme naissant" avait récemment déclaré M. Ould Abdel Aziz, dans un entretien au magazine New African. "Comme tous les pays, nous avons une jeunesse parfois égarée, qui se trouve prise dans les mailles du filet, avait-il ajouté. Elle est alors embrigadée, entraînée et se retourne parfois contre son propre pays". - AFP