Discours du Pr. Dioncounda Traoré à la Nation. «Il n’y a aucune raison de désespérer. Nous sommes un Peuple digne, un Peuple courageux. Tous, ensemble nous relèverons tous les défis auxquels nous sommes confrontés», clame le Président par intérim du Mali.
Dans son discours à la nation, le Président de la République par intérim du Mali a tout d’abord, en bon croyant, rendu grâce à Dieu: «je commence par rendre grâce à Allah Tout Puissant qui dans sa mansuétude infinie, me donne en cet instant, le privilège de pouvoir m’adresser à vous après le triste épisode du 21 mai où, au-delà de ma modeste personne, il a été porté un coup de plus à nos valeurs et à notre société».
Il fera par la suite, et dans cette même veine de bon croyant, preuve de gradeur d’âme en annonçant son pardon à ses agresseurs qui ont failli lui ôter la vie: «ma vie n’est rien à côté du Mali et à mes agresseurs je réitère mon pardon. Je pardonne pour le Mali, je pardonne au nom du Mali, car le Mali a besoin de toute son énergie et de tous ses enfants pour se remettre debout».
Pr. Dioncounda Traoré qui a gravi tous les échelons de commandement de la structure de l’Etat, a avec dignité, invité ses compatriotes à l’optimisme: «Nous sommes à un tournant capital de l’évolution du Mali en tant qu’Etat, en tant que nation, en tant que peuple. Je demeure convaincu, loin du pessimisme qui pourrait gagner quelques uns d’entre nous, que les défis qui sont aujourd’hui ceux de notre Pays peuvent être relevés».
Le septuagénaire de titiller la fibre patriotique de ses concitoyens: «Le Mali ne s’effondrera pas, malgré les rudes coups qu’il a reçus. Le Mali se redressera encore plus fier, encore plus solide ! Parce que la nation malienne est une grande nation. Une nation grande de chacune de ses communautés des régions de Kayes, Koulikoro, Sikasso, Ségou, Mopti, Gao, Tombouctou, Kidal et du district de Bamako».
Pour lui, «L’action isolée de quelques uns de ses enfants, momentanément égarés et celle de ceux qui n’aiment pas assez ce grand pays pour oublier un peu leurs personnes ne doivent pas occulter l’atout majeur que nous avons: celui d’avoir une majorité saine, des hommes et des femmes qui travaillent sous le soleil et la pluie et sur lesquels nous pouvons compter à tout moment. Le Mali ne s’effondrera pas, parce que fort de son passé, protégé par son histoire et fier de ses cultures qui ont contribué à la civilisation de l’universel et qui ont donné Tombouctou, Djenné et Sangha au monde».
C’est fort de la solidarité africaine notamment que le Pr. Traoré voit d’un bon œil l’avenir de son pays: «le Mali ne s’effondrera pas parce qu’il n’est pas seul. Il ne saurait être seul, pour avoir été de tous les combats pour la libération et le rayonnement de l’Afrique, pour le développement et la démocratie dans le monde».
Pour cela, invite-t-il, «Nous devons rester ouverts à tous les souffles, nous qui avons offert notre solidarité quand d’autres en avaient besoin, aussi bien en Afrique qu’ailleurs ! Nous devons comprendre et apprécier à sa juste valeur le formidable élan de solidarité qui s’est manifesté pour la préservation de notre intégrité territoriale et la sauvegarde de notre démocratie».
«A cet égard, la CEDEAO, l’Union Africaine, les Nations Unies et nos partenaires bilatéraux et multilatéraux ne sauraient être nos ennemis. Ce sont au contraire des mains amies qui nous sont tendues, soucieuses de nos problèmes internes certes, mais aussi des menaces qu’en ce moment le Mali, jadis porteur de paix, représente pour la sécurité, de la sous-région, de l’Afrique et du monde», a martelé l’homme d’Etat malien.
D’où cette invite: «Nous devons, et justement pour reconquérir notre souveraineté totale accepter cette solidarité, car elle découle du contrat qu’ont signé entre eux les pays candidats à la communauté des démocraties. Nous n’oublierons jamais dans ce partenariat ce qui fait l’identité du Mali et ce que doit être son apport et ce qui doit relever de sa seule compétence. En revanche nous nous devons d’éviter les débats qui nous mettent en deçà de l’Histoire et qui portent à terme un lourd préjudice à ce pays que nous avons en partage».
C’est surtout conscient du fait que «Le Mali est la somme de nos différences et de notre diversité, de nos qualités et de nos intelligences, de nos connaissances et de nos compétences, la somme de nos êtres physiques et moraux il est donc nécessairement beaucoup plus que chacun d’entre nous, il est donc forcément aux dessus de chacun d’entre nous » que le Président de la République par intérim du Mali a formulé une série de propositions face à ce qui constitue une triste réalité aujourd’hui d’un « Mali coupé en deux » avec des « images de personnes déplacées avec leur baluchon sur la tête, des femmes harassées tenant par la main leurs enfants apeurés, des vieilles personnes décharnées se trainant le long des axes routiers, nos populations et nos villes martyrisées. Tombouctou profanée et nos patrimoines culturels détruits …Bref ces images de la détresse humaine que nous avions l’habitude de voir à la télévision ne sont plus virtuelles».
Voici les propositions que Pr. Dioncounda Traoré estime «susceptibles d’améliorations et d’amendements, et dont j’espère qu’elles emporteront votre adhésion:
I. SECURITE DES INSTITUTIONS DE LA TRANSITION
Je voudrais réaffirmer ici la position qui a toujours été la mienne: «Je fais entièrement confiances aux services de sécurité maliens et à l’armée malienne pour assurer la sécurité du Président de la République et celles des autres institutions de la République».
Les dispositions déjà prises ou envisagées pourront, bien entendu, être affinées et améliorées en fonction des moyens et équipements que nous pourront réaliser.
II. ORGANES DE LA TRANSITION
Dans le but de compléter l’architecture institutionnelle de mieux l’adapter aux réalités sociopolitiques, aux missions de la transition, dans l’esprit de l’article 6 de l’accord cadre, je propose:
A/ Un Haut Conseil d’Etat (HCE) constitué du Président de la République et de deux Vice-présidents chargés d’assister le Président dans l’accomplissement des missions de la Transition.
• L’un des Vice-présidents représentera les Forces de Défense et de Sécurité et à ce titre il présidera notamment le Comité militaire de suivi de la Réforme des Forces de Défense et de Sécurité et s’occupera de toutes les questions militaires concernant le Nord du Mali ;
• L’autre Vice-président représentera les autres composantes des Forces vives de la Nation.
B/ Un Gouvernement d’Union Nationale : où seront représentées toutes les composantes des Forces Vives.
Les consultations conduisant à sa formation seront menées par le Président de la République.
C/ Un Conseil National de Transition (CNT) : ayant une compétence consultative et regroupant les représentants des partis politiques présents ou non à l’Assemblée Nationale et des représentants de la Société Civile.
Il sera piloté par le vice-président représentant les Forces vices.
D/ Une Commission Nationale aux Négociations (CNN) : conforme au souhait des Chefs d’Etat de la CEDEAO formulé au point 18 du communiqué final de la deuxième réunion du groupe de contact sur le Mali.
Cette commission sera chargée d’engager avec les mouvements armés du Nord du Mali des pourparlers de paix en relation avec le médiateur de la CEDEAO afin de rechercher par le dialogue, des solutions politiques négociées à la crise.
E/ Une requête en direction de la CEDEAO (de l’Union Africaine et des Nations Unies) en fonction des conclusions de la mission qui a séjourné dernièrement à Bamako.
Les Vice-présidents seront nommés et le Conseil National de la Transition (CNT) sera mis en place dans les meilleurs délais et en tout cas dans la quinzaine qui suivra la mise en place du Gouvernement d’Union Nationale.
Par ailleurs il reste entendu que ni le Président, ni le Premier ministre, ni les Ministres ne pourront se présenter à la prochaine élection présidentielle».
Avant de conclure, l’orateur a lancé un message patriotique à ses frères et sœurs maliens: «Il y a un temps pour la politique politicienne, un temps pour les ambitions personnelles, pour les intérêts individuels et corporatistes, un temps pour les querelles partisanes. Mais aujourd’hui, aujourd’hui, c’est le temps de la mobilisation de toutes et de tous pour sauver notre Pays en danger. C’est le temps du dépassement et de l’oubli de soi. Il s’agit aujourd’hui d’observer une trêve dans ces guéguerres improbables. Il s’agit de faire du Mali notre seule priorité. Il s’agit de ne plus perdre de temps dans des polémiques stériles, nous sommes engagés dans une course contre la montre et chaque seconde qui passe complique davantage les solutions requises».
«Alors unissons-nous pour sauver notre Patrie. Unissons-nous pour préserver notre démocratie. C’est l’appel vibrant que je vous lance, Maliennes et Maliens du Nord, du Sud, de l’Est et de l’Ouest. Il n’y a aucune raison de désespérer. Nous sommes un Peuple digne, un Peuple courageux. Tous, ensemble nous relèverons tous les défis auxquels nous sommes confrontés. Nous pouvons le faire et nous le ferons avec la grâce d’Allah».
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