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Faya Millimono et son comité dénoncent les massacres de Zoghota

Aug 26, 2012
Faya Millimono et son comité dénoncent les massacres de Zoghota

Les membres du Comité de crise sur les massacres des cinq habitants de Zoghota dans la nuit du 3 au 4 août dernier en Guinée, se sont rendus au Stade de Nongo, banlieue nord-est de Conakry, pour réclamer justice, a vécu AfricaLog.com sur place.

Des policiers et des gendarmes débarqués dès le début de la matinée ont empêché tout regroupement autour du terrain. Mais ils ont permis aux jeunes footballeurs du quartier de s’y entrainer. L’ordre d’empêcher la manifestation leur aurait été donné par leurs supérieurs qui ne voudraient pas de meeting qui «fragilise la quiétude sociale» en Guinée.

Des jeunes qui souhaitaient participer au meeting ont fustigé que Faya Millimono du Collectif des partis politiques pour la finalisation de la Transition, Ousmane Gaoual Diallo de l’UFDG, Etienne Soropogui des NFD, tous membres dudit Comité, se soient fait attendre. Ce qui les aurait démotivés. Et la pluie a fait le reste.

Une averse s’est abattue sur Conakry aux environs de 10h, l’heure à laquelle était prévu le début de la manifestation alors que c’est à 13h, que les organisateurs sont arrivés au stade. Les jeunes accusent aussi l’acte des agents de maintien d’ordre qui ont demandé aux journalistes de quitter les lieux, sous le prétexte fallacieux que ces derniers attirent les attentions. Qu’à cela ne tienne, les membres du Comité ont dénoncé les agents de maintien d’ordre et les autorités locales qui leur ont dit qu’ils ne sont pas autorisés à tenir leur meeting.

Des enfants jouent au ballon au stade du quartier Nongo

Faya Millimono, l’ancien membre de la Nouvelle Génération pour la République, NGR et président du Comité de crise sur les tueries de Zoghota, précise: «Nous avons voulu un meeting d’information ici sur place. Nous avons préféré ne pas faire une manifestation de rue qui peut entraîner des dérapages parce qu’on peut être mêlé par des gens mal intentionnés. Mais ce qui se passe dans notre pays est scandaleux. Ce sont des citoyens qui dormaient, ça peut être des frères, des sœurs à vous et à chacun de ceux qui sont là, y compris nos frères qui sont en uniformes, qu’on a tués. Lorsque ces genres de pratiques se font dans un Etat dit de droit, il est de la responsabilité de chacun de nous de faire en sorte que nous condamnions cela. Et surtout que nous exigions la justice.»

Mais qu’est-ce qu’ils veulent en organisant un meeting?

«Nous voulons qu’une commission d’enquête indépendante soit mise en place. C’est la seule chose que nous demandons,» a répondu Dr. Faya Millimono qui estime qu’une fois cette commission mise en place, il faut démettre des gens qui peuvent empêcher que l’enquête aboutisse. Car, il y aurait des milices à N’Zérékoré. «Il y a le gouverneur, le préfet, la hiérarchie de la gendarmerie et de la police. Tous ces gens-là, et s’ils sont en fonction, aucune enquête ne peut aboutir.»

Faya Millimono insiste que le meeting a pour objectif d’attirer l’attention de l’opinion nationale et internationale sur ce qui se passe en Guinée. Il pensait que les agents de maintien d’ordre qui ont été déployés à Nongo étaient chargés de sécuriser les manifestants, qui n’avaient d’armes que leurs propos dénonçant la tuerie de Zoghota. «C’est ce qui se fait dans tous les Etats de droit. Mais les agents étaient prêts à mater. Lorsqu’on nous a donné un papier volant, un manuscrit, je crois que nous ne sommes pas dans un pays qui se respecte. La lettre ne nous a été donnée qu’hier (24 août ndlr) à 18 heures. Or, nous avions soumis la demande le mardi 21 août. On devait nous répondre le lendemain ou bien le jeudi. Mais on a attendu vendredi soir pour nous répondre, sachant que ce matin, nous devrions être-là... ». Faya Millimone s’est dit très remonté du fait qu’il a été empêché de manifester.

Etienne Soropogui des Nouvelles forces démocratiques, NFD, n’est pas moins amère. Aux agents, il leur a dit: «Vous n’êtes pas venus pour sécuriser le meeting. Mais sachez que nous sommes-là pour sauver la nation, pour que des valeurs humaines soient respectées, cela n’est pas négociable.» Il demande de laisser le Comité passer son message et que s’il y a dérapage, les membres du Comité s’engagent à répondre.

Mme Ramatoulaye Diallo, présidente de la délégation spéciale de la Commune de Ratoma voit le meeting autrement: «La lettre qui m’a été envoyée ne concerne pas les ressortissants de la Forêt. Parce que ceux qui l’ont signé, sont seulement des Peulhs. Quand j’ai lu la lettre, elle était très mal rédigée. Il n’y avait pas d’anonymat, trois personnes l’ont signé, mais il n’y a pas leurs numéros de téléphone. Donc, j’ai trouvé nécessaire de surseoir le meeting».

C’est cela les motifs d’interdiction du meeting?

Mme Ramatoulaye Diallo se met dans une colère noire: «Vous savez, vous faites exprès. Vous savez ce qui se passe dans ce pays-là. Même si tu leur dis cela, s’il reste réticent, qu’est-ce que moi je peux faire? En tout cas, ce que je peux faire, c’est de dire de surseoir au meeting d’aujourd’hui. Et le meeting n’aura pas lieu jusqu’à nouvel ordre. Il faudrait qu’on respecte la loi, personne n’est au-dessus de la loi.»

Elle estime que si le Comité de crise avait bien rédigé sa lettre, elle aurait accepté la tenue du meeting, puisque la Guinée est un pays démocratique, mais, dit-elle, les responsables du Comité n’ont pas respecté les règles. «Ils n’ont pas respecté la commune. Parce que même un chien n’écrit pas comme ça à une autorité... » Elle affirme avoir porté plainte contre un membre du Comité qui lui a déposé ladite missive.

Mais Mme Diallo s’y est catégoriquement opposée et elle a bénéficié du soutien de son adjoint, Sékou Camara. «Je compati avec Mme Ramatoulaye, malgré qu’elle s’est fâchée, mais ce qu’elle a dit est normal. Nous n’avons pas été respectés. Quand M. Faya Millimono dit qu’ils n’ont pas besoin d’autorisation, cela est grave. Les enfants jouent au ballon. Et nous n’avons pas été informés à temps pour qu’on leur dise qu’il y a une manifestation ici aujourd’hui… ».

M. Camara dit que c’est le 24 août à 16h, que la commune a reçu la lettre du Comité. Mais une lettre «mal rédigée, illisible, qui ressemble à un tract. Voilà les raisons qui nous ont poussées à refuser qu’il y ait la manifestation ici aujourd’hui», croit-il se justifier.

Il semble que vous aviez interpellé aussi le porteur du courrier… «L’interpeller ? C’est faux ! On l’a appelé plutôt pour qu’il puisse prendre l’engagement en cas de débordement… », se contredit le vice-maire de Ratoma qui affirme que l’affaire de Zoghota les intéresse, mais déplore la manière de la dénoncer. Sékou Camara estime que des bandits pourraient infiltrer le meeting. Mais si Faya Millimono récrit une lettre lisible, compréhensible, est-ce que les autorités communales de Ratoma seront prêtes à encadrer la manifestation?

«Faire la marche n’est pas mauvais, faire le meeting n’est pas mauvais, mais quand vous le faites pour perturber, pour casser des voitures, pour mettre le feu dans notre cité, on ne pourra pas l’accepter. Nous avons trop souffert, acceptons qu’on s’asseye autour d’une même table pour dire la vérité l’un à l’autre et qu’on se pardonne…», a-t-il disserté.

Ousmane Diallo du Comité de crise et de l’Union des forces démocratiques de Guinée, UFDG, a fait la réplique: «Il faut que les gens comprennent que c’est la loi qui le dit. Ou c’est l’anarchie ou bien on jette le bout de papier qui s’appelle Constitution. Le maire dit que c’est interdit, le gouverneur dit la même chose, le ministre également, il n’y a pas d’interdiction possible d’une manifestation, c’est la Constitution qui le consacre.»

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