Une semaine après la formation d'un nouveau gouvernement, la contestation s'amplifie au Burkina où des policiers, suivant l'exemple de militaires, se sont mutinés mercredi soir et jeudi dans plusieurs villes dont la capitale, après une nouvelle manifestation à Koudougou (centre).
Pour la première fois depuis le début des contestations populaires en février, des policiers de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) à Ouagadougou se sont mutinés mercredi soir, tirant en l'air avec leurs armes, dans et à l'extérieur de leur caserne.
Les tirs ont repris jeudi matin dans cette même caserne, puis le mouvement s'est étendu au commissariat central de la capitale, ainsi qu'à la direction générale de la police, a constaté un journaliste de l'AFP. Les policiers qui tiraient depuis l'intérieur du commissariat dans le centre-ville, ont également érigé des barricades tout autour.
Les gendarmes, des militaires, ont vainement tenté de prendre le contrôle de la direction générale de la police occupée par des policiers mutins.
"Une quarantaine (de gendarmes) sont venus pour prendre des armes et le contrôle du bâtiment. Nous les avons repoussés vigoureusement en bloquant le portail d'entrée. Il n'y a pas eu de tir", a affirmé à l'AFP un mutin. "Nous ne voulons pas nous en prendre à la population. C'est un problème entre nous" et les autorités, a-t-il ajouté.
Des tirs de policiers ont également été entendus mercredi soir et jeudi matin à Bobo-Dioulasso (sud-ouest), deuxième ville du pays, ainsi qu'à Fada N'Gourma (est), Dédougou (ouest), Manga et Pô (sud).
Ces mouvements de protestation de policiers interviennent après les mutineries de militaires dans plusieurs villes, dont les soldats de la propre garde du président Blaise Compaoré, il y a deux semaines à Ouagadougou.
Les policiers, tout comme les soldats dont les revendications ont été satisfaites, réclament de meilleures rémunérations.
Les mutineries de policiers ont eu lieu après une nouvelle manifestation violente de commerçants et de jeunes mercredi à Koudougou, ville du centre du Burkina Faso d'où était partie le 22 février la vague de contestation populaire qui secoue le pays, après la mort d'un jeune dans une manifestation.
Les producteurs de coton ont également manifesté pacifiquement mercredi à Bobo-Dioulasso pour réclamer une hausse du prix d'achat de leur production et une baisse de celui des engrais.
Les manifestations de colère contre la vie chère et le régime de Blaise Compaoré, arrivé au pouvoir en 1987 par un coup d'Etat militaire, touchent désormais presque toutes les catégorie socio-professionnelles du pays: jeunes, commerçants, élèves, étudiants, magistrats, personnels de santé et maintenant policiers et producteurs de coton.
Depuis février, elles ont fait au moins six morts (dont quatre étudiants), des blessés, d'innombrables pillages commis par les soldats mutins et des dégâts matériels considérables.
Le limogeage des chefs de l'armée, l'instauration d'un couvre-feu nocturne à Ouagadougou, la nomination d'un nouveau Premier ministre, suivie le 21 avril de la formation d'un gouvernement composé de fidèles du chef de l'Etat qui s'est attribué le portefeuille de la Défense, n'ont pas calmé les esprits.
Dans ce climat tendu, une conférence de presse du Premier ministre, Luc Adolphe Tiao, prévue jeudi après-midi, était très attendue.
L'opposition a appelé à une grande manifestation samedi à Ouagadougou contre le régime Compaoré et la vie chère, alors que la majorité des 16 millions de Burkinabès survit avec 1,50 euro par jour. - AFP