Les Gambiens ont voté jeudi à une présidentielle sans surprise, le sortant Yahya Jammeh, qui dirige son pays d'une main de fer et sollicite un quatrième mandat depuis son arrivée au pouvoir par un coup d'État en 1994, étant assuré de l'emporter face à une opposition divisée.
Les bureaux de vote, qui avaient ouvert à 7h (2h heure du Québec), ont fermé pour la plupart à 16h, certains demeurant accessibles jusqu'à 18h.
Selon Justice Colley, porte-parole de la commission électorale, le vote s'est déroulé sans incident dans ce petit pays d'Afrique de l'Ouest.
Quelque 797 000 électeurs - sur 1,7 million d'habitants - étaient appelés à choisir le président lors de ce scrutin à tour unique supervisé par 350 observateurs nationaux et internationaux. Les résultats définitifs sont attendus vendredi après-midi.
Ceux de la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) n'ont pas fait le déplacement, l'organisation régionale ayant estimé que les conditions d'une élection «libre, juste et transparente» n'étaient pas réunies, dénonçant en particulier «l'intimidation» contre les opposants.
Après avoir voté en compagnie de son épouse, Zained, M. Jammeh a minimisé la décision de la Cédéao: «Moi, en tant que président, je m'en fous de ce que les autres disent. Ce qui m'importe, c'est le développement de ce pays».
M. Jammeh, 46 ans, qui s'est présenté pour un quatrième mandat de cinq ans, est largement favori et a pu compter sur la voix d'Amie Khan, 27 ans, dans un bureau à Kombo-Nord, un quartier de Banjul. «J'ai voté pour Jammeh car grâce à lui, j'ai pu aller à l'université», a-t-elle dit.
Musa Sanneh, chômeur d'une trentaine d'années électeur à Serrekunda (près de Banjul), a par contre voté contre le président sortant: «17 ans de mauvaise gouvernance, ça suffit, Jammeh doit partir», a-t-il estimé.
Vote avec des billes
Face à Yahya Jammeh, accusé par des ONG de graves atteintes aux droits de l'Homme et à la liberté d'expression, l'opposition n'a pas réussi à s'unir et a présenté deux candidats: Ousainou Darboe, 63 ans, et Hamat Bah, 51 ans.
Après avoir voté, M. Darboe a dénoncé l'important déploiement de soldats dans le pays, «surtout à Banjul», estimant qu'il visait à intimider les électeurs.
MM. Darboe et Bah accusent le chef de l'État de diriger le pays comme si c'était son bien personnel, s'octroyant plusieurs ministères, des entreprises et des hectares de terres.
Outre des sacs de riz, du sucre ou du matériel agricole, le président gambien aime aussi lancer des biscuits à ceux qui se massent au bord des routes pour le voir passer dans son convoi.
«Nous ne voulons pas de biscuits, nous voulons des changements»!», ont scandé pendant la campagne les partisans de Ousainou Darboe.
Le plus souvent vêtu d'un boubou blanc, sceptre et Coran en main, M. Jammeh affirme posséder «des pouvoirs spéciaux» qui lui permettent de guérir les malades, dont ceux atteints du sida.
Depuis son arrivée au pouvoir, cet ex-militaire peut cependant se prévaloir d'avoir contribué à développer son pays: en partie grâce au tourisme, la Gambie, table sur un taux de croissance de 5,5% en 2011.
Cet État anglophone membre du Commonwealth, ex-colonie britannique en partie enclavée dans le Sénégal, s'est doté depuis 1994 d'infrastructures modernes, routes, écoles, hôpitaux.
Une croissance qui ne se traduit toutefois pas dans le niveau de vie des quelques 1,7 million de Gambiens dont une majorité vit avec moins de 2$ par jour.
En raison de l'illettrisme dans le pays, les électeurs ne votent pas avec un bulletin imprimé classique, mais avec une bille déposée dans une sorte de bidon: il y a trois bidons dont chacun porte une couleur différente correspondant à un candidat. – AfricaLog avec AFP